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'J.LACAN'                        gaogoa

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IX-L'IDENTIFICATION

            Version rue CB                                    [#note note]

S�minaire du 27 juin 1962

    (->p533) (XXVI/1)

    Aujourd'hui dans le cadre de l'enseignement th�orique que nous aurons r�ussi cette ann�e � parcourir ensemble, je vous indique qu'il me faut choisir mon axe, si je puis dire et que je mettrai l'accent sur la formule-support de la troisi�me esp�ce d'identification que je vous ai not�e d�s longtemps, d�s le temps du graphe sous la forme de S barr� que vous savez lire maintenant comme coupure de grand S <> a. non pas sur ce qui y est implicite, nodal � savoir le F le point gr�ce auquel l'�version peut se faire de l'un dans l'autre, gr�ce auquel les deux termes se pr�sentent comme identiques, � la fa�on de l'envers et de l'endroit, non pas de n'importe quel envers et de n'importe quel endroit. Sans cela je n'aurai pas eu besoin de vous montrer en son lieu ce qu'il est quand il repr�sente la double coupure sur cette surface particuli�re dont j'ai essay� de vous montrer la topologie dans le cross-cap.  

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    Ce point ici d�sign� est le point F gr�ce auquel le cercle indiqu� par cette coupure peut �tre pour nous le sch�ma mental d'une identification originale ; ce point - je crois avoir assez accentu� dans mes derniers discours sa fonction structurale - peut, jusqu'� un certain point rec�ler pour vous trop de propri�t�s satisfaisantes ; ce phallus . Le voil� avec cette fonction magique qui est bien celle que tout notre discours lui implique d�s longtemps. Ce serait un peut trop facile que (->p534) (XXVI/2)  de trouver l� notre point de chute.

    C'est pourquoi aujourd'hui je veux mettre l'accent sur ce point, c'est-�-dire sur la fonction de a, le petit a en tant qu'il est � la fois � proprement parler ce qui peut permettre de concevoir la fonction de l'objet dans la th�orie analytique, � savoir cet objet qui dans la dynamique  psychique est ce qui structure pour nous tout 1e proc�s progresssif-r�gressif, ce � quoi nous avons affaire dans nos  rapports du sujet � sa r�alit� psychique, mais c'est aussi notre objet, l'objet de la science analytique.

    Et ce que je veux mettre en avant, dans ce que je vais vous en dire , c'est que si nous voulons qualifier cet objet dans une perspective proprement logique, j'accentue : logicisante, nous n'avons rien de mieux � en dire sinon ceci qu'il est l'objet de la castration. J'entends par l�, je sp�cifie, par rapport aux autres fonctions d�finies jusqu'ici de l'objet. Car si on peut dire que l'objet dans le monde, pour autant qu'il s'y discerne, est l'objet d'une privation, on peut dire �galement que l'objet est l'objet d'une frustration. Et je vais essayer de vous montrer justement en quoi cet objet qui est le notre s'en distingue. 

    Il est bien clair que si cet objet est un objet de la logique, il ne saurait avoir �t� jusqu'ici compl�tement absent, ind�celable dans toutes les tentatives faites pour articuler comme telle ce qu'on appelle la logique.

    La logique n'a pas exist� de tout temps sous la m�me forme. Celle qui nous a parfaitement satisfaits, nous a combl� jusqu'� Kant qui s'y complaisait encore, cette logique formelle, n�e un jour sous la plume d'Aristote, a exerc� cette captivation, cette fascination jusqu'� ce qu'on s'attache, au si�cle dernier, � ce qui pouvait y �tre repris dans le d�tail. On s'est aper�u par exemple qu'il y manquait beaucoup de choses du c�t� de la quantification. Ce n'est certainement pas ce qu'on y a ajout� qui est int�ressant, mais c'est ce par quoi elle nous retenait. Et bien des choses qu'on a cru devoir y ajouter ne vont que dans un sens singuli�rement st�rile.

    En fait, c'est sur la r�flexion que l'analyse nous impose concernant ces pouvoirs si longtemps insistant de la logique aristot�licienne, que (->p535) (XXVI/3) peut se pr�senter pour nous l'int�r�t de la logique. Le regard de celui qui d�pouille de tous ses d�tails si fascinants la logique formelle aristot�licienne doit - je vous le r�p�te - s'abstraire de ce qu'elle a apport� de d�cisif, de coupure dans le monde mental pour comprendre m�me vraiment ce qui l'a pr�c�d�e, par exemple la possibilit� de toute la dialectique platonicienne qu'on lit toujours comme si la logique formelle �tait d�j� l�, ce qui la fausse compl�tement pour notre lecture. Mais laissons.

    L'objet aristot�licien - car c'est bien ainsi qu'il faut l'appeler - a justement, si je puis dire, pour propri�t� de pouvoir avoir des propri�t�s qui lui appartiennent en propre : ses attributs. Et ce sont ceux-ci qui d�finissent les classes.

    Or ceci est une construction qu'il ne doit qu'� confondre ce que j'appellerai - faute de mieux - les cat�gories de l'�tre et de l'avoir.

    Ceci m�riterait de longs d�veloppements et, pour vous faire franchir ce pas je suis oblig� de recourir � un exemple qui me servira de support.

     D�j� cette fonction d�cisive de l'attribut je vous l'ai montr�e dans le cadran : c'est l'introduction du trait unaire qui distingue la partie phasique o� il sera dit par exemple que tout trait est vertical, ce qui n'implique en soi l'existence d'aucun trait, de la partie lexique  

 

o� il peut y avoir des traits verticaux, mais o� il peut n'y en pas avoir. Dire que tout trait est vertical doit �tre la structure originelle, la fonction d'universalit�, d'universalisation propre � une logique fond�e sur le trait de la privation.

   Par  c'est tout, il �voque je ne sais quel �cho du Dieu Pan : c'est bien l� une 

des coalescences mentales dont je vous prie de faire l'effort de la rayer de vos papiers. Le nom du Dieu Pan n'a absolument rien � faire avec le tout, et les effets paniques auquel il se joue le soir aupr�s des esprits simples de la campagne n'ont rien � voir avec quelque effusion mystique ou non.

    Le raptus alcoolique, dit par les vieux auteurs panophobique, est bien nomm� en ce sens que, lui aussi, quelque chose le traque, le perturbe, et qu'il passe par la fen�tre. Il n'y a rien � mettre l�-dedans, c'est une erreur des esprits trop hell�nistes d'y apporter cette retouche (->p536) (XXVI/4) sur laquelle un de mes ma�tres anciens, pourtant bien-aim� de moi, nous apportait cette rectification : "on doit dire le raptus pantophobique". Absolument pas, par par est bien en effet le tout et, si cela se rapporte  � quelque chose, c'est � paraodai � la possession. Et peut-�tre trouverai-je � me faire reprendre si je rapproche ce pas du pos de possidero et de possum ; mais je n'h�site point � le faire.

     La possession ou non du trait unaire, du trait caract�ristique, voil� autour de quoi tourne l'instauration d'une nouvelle logique classificatoire explicite des sources de l'objet aristot�licien. Ce terme "classificatoire", je l'emploie intentionnellement puisque c'est gr�ce � Claude L�vi-Strauss si vous avez d�sormais le corpus, l'articulation dogmatique de la fonction classificatoire � ce qu' i1 appel le lui-m�me - je lui en laisse la responsabilit� humoristique - "l'�tat sauvage", bien plus proche de la dialectique platonicienne que de l'aristot�licienne, la division progressive du monde en une s�rie de moiti�s, couple de termes antipodiques qui l'enserrent dans des types. Donc, sur ce sujet lisez "la pens�e Sauvage", vous verrez que l'essentiel tient en ceci : ce qui n est pas h�risson, mais que vous voudrez musaraigne ou marmotte , est autre chose.

    Ce qui caract�rise la structure de l'objet aristot�licien, c'est ce qui n'est pas h�risson est non-h�risson. C'est pourquoi je dis que c'est la logique de l'objet de la privation.

    Ceci peut nous mener beaucoup plus loin, jusqu'� cette sorte d'�lusion par quoi le probl�me se pose toujours aigu dans cette logique de la fonction v�ritable du tiers exclu dont vous savez qu'elle fait probl�me jusqu'au coeur de la logique la plus �labor�e, de la logique math�matique.

    Mais nous avons affaire � un d�but, � un noyau plus simple, que je veux pour vous imaginifier, comme je vous l'ai dit, par un exemple. Et je n'irai pas le chercher bien loin, mais dans un proverbe qui pr�sente dans la langue fran�aise une particularit� qui cependant ne saute pas aux yeux, tout au moins des francophones. Le proverbe est celui-ci : "Tout ce qui brille n'est pas or".

    Dans la colloqualit� allemande par exemple, ne croyez pas qu'on puisse se contenter de la transcrire tout cru : "alles was gl�nzt ist keine Gold". Ce ne serait pas une bonne traduction. Je vois Melle Uberfre opiner du bonnet � m'entendre ; elle m'approuve en ceci : "nicht alles (->p537) (XXVI/5) was gl�nzt ist Gold". Cela peut donner plus de satisfaction quant au sens apparemment, mettant l'accent sur le "alles", gr�ce � une anticipation du "nicht" qui n'est nullement habituelle, qui force le g�nie de la langue et qui, si vous y r�fl�chissez, marque que le sens, car ce n'est pas de cette distinction qu'il s'agit.

    Je pourrais employer les cercles d'Euler, les m�mes dont nous sommes servis l'autre jour � propos du rapport du sujet � un cas quelconque :  

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tous les hommes sont menteurs. Est-ce simplement ce que cela signifie ? C'est que pour me refaire ici, une partie de ce qui qui brille est dans le cercle de l'or et une autre partie n'y est pas. Est-ce l� le sens ?

 Ne croyez pas que je sois le premier parmi les logiciens � m'�tre arr�t� � cette structure.  Et � la v�rit�, plus d'un auteur qui s'est occup� de la n�gation s'est arr�t� en effet � ce probl�me, non point tant du point de vue de la logique formelle qui, vous le voyez, ne s'y arr�te gu�re si non pour le

m�conna�tre du point de vue de la forme grammaticale, insistant sur ceci que les tours s'ordonnent de telle fa�on que soit justement mise en question "l'orit�", si je puis m'exprimer ainsi, la qualit� d'or de ce qui brille. L'authentique de l'or va donc dans le sens d'une mise en question radicale ; l'or est ici symbolique de ce qui fait briller et, si je puis dire pour me faire entendre, j'accentue, ce qui donne � l'objet la couleur fascinatoire du d�sir.

    Ce qui est important dans une telle formule, si je puis m'exprimer ainsi - pardonnez-moi le jeu de mots - c'est le point "d'OR age" autour de quoi tourne la question de savoir ce qui fait briller, et pour dire le mot, la question de ce qu'il y a de vrai dans cette brillance.

    Et, � partir de l�, bien s�r nul or ne sera assez v�ritable pour assurer ce point autour duquel subsiste la fonction du d�sir.

    Telle est la caract�ristique radicale de cette sorte d'objet que j'appelle petit a : c'est l'objet mis en question, en tant qu'on peut dire que c'est ce qui nous int�resse, nous autres analystes, comme ce

(->p538) (XXVI/6) qui int�resse l'auditeur de tout enseignement. Ce n'est pas pour rien que j'ai vu surgir la nostalgie sur la bouche de tel ou tel qui voulait dire : "Pourquoi ne dit-il pas", comme s'est exprim� quelqu'un, "le vrai sur le vrai ?". C'est vraiment un grand honneur qu'on peut faire � un discours qui se tient tous les huit jours dans cette position insens�e d'�tre l� derri�re une table devant vous � articuler cette sorte d'expos� dont justement on se contente fort bien d'ordinaire qu'il �lude toujours une telle question.

    S'il ne s'agissait pas de l'objet analytique, � savoir de l'objet du d�sir, jamais une telle question n'aurait pu m�me songer � surgir, sauf de la bouche d'un huron qui s'imaginerait que lorsqu'on vient � l'Universit� c'est qu'il rentre dans la norme, qu'on sache � quoi on a affaire, ce qui est dehors et ce qui est dedans, ce que vous montre cet �tat de la figure, car vous voyez bien comment il faut la voir.  

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    Ce lobe s'est prolong� de l'autre c�t�, il a gagn� sur l'autre face 2 ; il nous montre visiblement que la boucle externe va, dans cette surface, rejoindre la boucle interne � condition de passer par l'ext�rieur. La surface des plans projectifs se compl�te, se ferme, s'ach�ve. L'objet d�fini comme notre objet, l'objet formateur du monde du d�sir ne rejoint son intimit� que par une voie centrifuge.

    Qu'est-ce � dire ? Que trouvons-nous l� ? Je reprends de plus haut. La fonction de cet objet est li�e par o� le sujet se constitue dans sa relation au lieu de l'Autre, grand A, qui est le lieu o� s'ordonne la r�alit� du signifiant. C'est au point o� toute signifiance fait d�faut, s'abolit, au point nodal dit le d�sir de l'Autre, au point phallique, pour autant qu'il signifie l'abolition comme telle de toute signifiance, que l'objet petit a, objet de la castration, vient prendre sa place.

    I1 a donc un rapport au signifiant, et c'est pour cela qu'ici encore je dois vous rappeler la d�finition dont je suis parti cette ann�e concernant le signifiant : le signifiant n'est pas le signe ; et l'ambigu�t� de l'attribut aristot�licien, c'est justement de vouloir le naturaliser, (->p539) (XXVI/7) ou faire le signe naturel : "toute chatte tricolore est femelle". Le signifiant, vous ai-je dit, c'est contrairement au signe qui repr�sente quelque chose pour quelqu'un, ce qui repr�sente le sujet pour un autre signifiant. Et il n'y a pas de meilleur exemple que le sceau.

Qu'est-ce qu'un sceau ? le lendemain du jour o� je vous livrais cette formule, le hasard fit qu'un antiquaire de mes amis me remit entre les mains un petit sceau �gyptien qui, dune fa�on non habituelle mais non rare non plus, avait la forme d'une semelle avec, sur le dessus, les doigts du pied et les dos dessin�s. Le sceau, comme vous l'avez compris, je l'ai trouv� dans les textes, c'est bien cela : une trace si l'on peut dire - et il est vrai que la nature en abonde - ; mais �a ne peut devenir un signifiant que si, cette trace, avec une paire de ciseaux, vous en faites le tour et vous la d�coupez. Si vous extrayez la trace apr�s, cela peut devenir un sceau. Et je pense que l'exemple vous �claire d�j� suffisamment : un sceau repr�sente le sujet, l'envoyeur-pas forc�ment pour le destinataire : une lettre peut toujours rester scell�e ; mais le sceau est l� : pour la lettre, il est un signifiant.

    Eh bien, l'objet petit a, l'objet de la castration participe de la nature ainsi exemplifi�e de ce signifiant. C'est un objet structur� comme cela. En fait, vous vous apercevez de ce qu'au terme de tout ce que les si�cles ont pu r�ver de la fonction de connaissance, il ne nous reste en main que cela. Dans la nature, il y a de la chose, si je puis m'exprimer ainsi, qui se pr�sente avec du bord. Tout ce que nous pouvons y conqu�rir, qui simule une connaissance �a n'est jamais que d�tacher ce bord et non pas s'en servir, mais l'oublier         pour voir le reste qui,  

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 chose curieuse, de cette extraction se trouve compl�tement transform�, exactement comme le cross-cap vous 1'image, � savoir, ne l'oubliez pas qu'est-ce que ce cross-cap ? C'est une sph�re. Je vous l'ai d�j� dit ; il la faut, on ne peut pas s'en passer du cul de cette sph�re. C'est une sph�re avec un trou, que  vous organisez d'une certaine fa�on, et vous  pouvez tr�s bien imaginer que c'est en tirant  sur un de ses bords que vous faites appara�tre, plus ou moins en le retenant, ce quelque chose qui va venir boucher le trou � condition de r�aliser ceci que chacun de ces points s'unisse


(->p540) (XXVI/8) point oppos�, ce qui cr�e des difficult�s intuitives naturellement consid�rables et m�me qui nous ont oblig�s � toute la construction que j'ai d�taill�e devant vous, sous la forme du cross-cap imag� dans l'espace.

    Mais quoi ? Quel est l'important ? C'est que, par cette op�ration qui se produit au niveau du trou, le reste de la sph�re est transform� en surface de Moebius par l'�nucl�ation de l'objet de la castration. Le monde entier s'ordonne d'une certaine fa�on qui nous donne, si je puis dire, l'illusion d'�tre un monde. Et je dirai m�me que, d'une certaine fa�on, de faire un �tat interm�diaire entre cet objet aristot�licien o� cette r�alit� est en quelque sorte masqu�e et notre objet que j'essaie ici pour vous de promouvoir, j'introduirai dans le milieu cet objet qui nous inspire � la fois la plus grande m�fiance en raison de pr�jug�s h�rit�s d'une �ducation �pist�mologique, mais qui est ce bien s�r qui est notre grande tentation - nous autres, dans l'analyse, si nous n'avions pas eu l'existence de Jung pour l'exorciser, nous ne nous serions peut-�tre m�me pas aper�us � quel point nous y croyons toujours - c'est l'objet de la Naturwissenschaft, c'est l'objet go�th�en, si je puis dire, l'objet qui dans la nature lit, sans cesse comme � livre ouvert toute les figures d'une intention qu'il faudrait appeler quasi divine si le terme de Dieu n'avait �t� d'un autre c�t� si bien pr�serv�.

    Cette, disons-le, d�monique plut�t que divine intuition goeth�enne qui lui fait aussi bien lire dans le cr�ne trouv� sur le Lido la forme de Werther compl�tement imaginaire ou forger la th�orie des couleurs, bref laisse pour nous les traces d'une activit� dont le moins qu'on puisse dire c'est qu'elle est cosmog�ne, engendreuse des plus vieilles illusions de l'analogie micromascrocospique, et pourtant captivante encore dans un esprit si proche de nous.

    A quoi cela tient-il ? A quoi le drame personnel de Goethe doit-il la fascination exceptionnelle qu'il exerce sur nous sinon � l'effleurement comme central du drame, chez lui, du d�sir. "Warum Goethe Hess Frederik ?" a �crit, vous le savez, un des survivants de la premi�re g�n�ration dans un article " Theodor Reik.

    La sp�cificit� et le caract�re fascinant de la personnalit� de Goethe, c'est que nous y lisons dans toute sa pr�sence l'identification de l'objet du d�sir � ce � quoi il faut renoncer pour  que nous soit livr� (->p541) (XXVI/9) le monde comme monde.

     J'ai tr�s suffisamment rappel� la structure de ce cas en en montrant l'analogie avec celle d�velopp�e par Freud dans l'histoire de l'Homme aux Rats, dans "Le mythe individuel du n�vros�". Ou plut�t l'a-t-on fait para�tre sans mon consentement quelque part, puisque ce texte je ne l'ai ni revu ni corrig�, ce qui le rend quasi illisible ; n�anmoins il tra�ne par-ci par-l� et on  peut en retrouver les grandes lignes.

    Dans ce rapport compl�mentaire de a, l'objet d'une castration constitutive o� se situe notre objet comme tel, avec ce reste et o� nous ne pouvons tout lire, et sp�cialement notre figure i(a), c'est ceci que j'ai tent� d'illustrer cette ann�e � la pointe, pour vous, de mon discours.

     Dans l'illusion sp�culaire, dans 1a m�connaissance fondamentale � laquelle nous avons toujours affaire, S (A) prend fonction d'image sp�culaire sous la forme de i de a alors qu'il n'a, si je puis dire, avec elle rien � faire de semblable ? II ne saurait d'aucune fa�on y lire son image pour la bonne raison que, s'il est quelque chose ce S barr�, ce n'est pas le compl�ment de petit i facteur de petit a, �a pourrait en �tre assez bien la cause, dirons-nous - et j'emploie ce terme intentionnellement, car depuis quelque temps justement, depuis que les cat�gories de la logique flageolent un peu, la cause - bonne ou mauvaise - n'a en tout cas pas bonne presse et 1'on pr�f�re �viter d'en parler.

    Et en effet il n'y a gu�re que nous qui puissions nous y retrouver dans cette fonction dont en somme on ne peut approcher l'ombre ancienne apr�s le progr�s mental parcouru, qu'� y voir en quelque sorte l'identique de tout ce qui se manifeste comme effets, mais quand ils sont encore voil�s. Et bien entendu ceci n'a rien de satisfaisant, sauf peut-�tre si justement �a n'est pas d'�tre � la place de quelque chose, de couper tous les effets, que la cause soutient son drame. S'il y a d'ailleurs aussi bien une cause qui soit digne que nous nous y attachions, au moins par notre attention, �a n'est pas toujours et d'avance une cause perdue .

    Donc nous pouvons articuler que s'il est quelque chose sur quoi nous devons mettre l'accent loin de l'�luder, c'est que la fonction de l'ob-(->p542) (XXVI/10)jet partiel ne saurait pour nous d'aucune fa�on �tre r�duite, si ce que nous appelons l'objet partiel c'est ce qui d�signe le point de refoulement du fait de sa perte.

    Et c'est � partir de l� que s'enracine l'illusion de la cosmicit� du monde. Ce point acosmique du d�sir en tant qu'il est d�sign� par l'objet de la castration, c'est ce que nous devons pr�server comme le point pivot, le centre de toute �laboration de ce que nous avons � accumuler comme faits concernant la constitution du monde comme objectal. Mais cet objet petit a que nous voyons surgir au point de d�faillance de l'Autre, au point de perte du signifiant parce que cette perte c'est la perte de cet objet m�me, du membre jamais retrouv� d'Horus d�membr�, cet objet comment ne pas lui donner ce que j'appellerai parodiquement sa propri�t� r�flexive, si je puis dire, puisque c'est de lui qu'elle part, que c'est pour autant que le sujet est d'abord et uniquement essentiellement coupure de cet objet que quelque chose peut na�tre qui est cet intervalle entre cuir et chair entre Wahrnemung et Bewusstsein, entre perception et conscience qui est la Selbstbewusstsein. C'est ici qu'il vaut de dire sa place entre une ontologie fond�e sur notre exp�rience. Vous verrez qu'elle rejoint ici une formule longuement comment�e par Heiddeger, dans son origine pr�socratique.

    Le rapport de cet objet � l'image du monde qui l'ordonne constitue ce que Platon a appel� � proprement parler la dyade � condition que nous nous apercevions que clans cette driade le sujet S barr� et le petit a sont du m�me c�t� : to amto einai kai noiig. Cette formule qui a longtemps servi � confondre ce qui n'est pas soutenable, l'�tre et la connaissance, ne veut pas dire autre chose que cela.

    Par rapport au corr�latif petit a, � ce qui reste quand l'objet constitutif du fantasme s'est s�par�, �tre et pens�e sont du m�me c�t�, du c�t� de ce petit a. Petit a, c'est l'�tre en tant qu'il est essentiellement manquant au texte du monde. Et c'est pourquoi autour de petit a peut se glisser tout ce qui s'appelle retour du refoul�, c'est-�-dire qu'y suinte et s'y trahit la vraie v�rit� qui nous int�resse et qui est toujours l'objet du d�sir, en tant que toute humanit�, tout humanisme est construit pour nous la faire manquer.

    Nous savons par notre exp�rience qu'il n'y a rien qui p�se dans le monde v�ritablement que ce qui fait allusion � cet objet dont l'Autre,(->p543) (XXVI/11) grand A prend la place pour lui donner un sens.

    Toute m�taphore, y compris celle du sympt�me cherche � faire sortir cet objet dans la signification, mais toute la pullulation des sens qu'elle peut engendrer n'arrive pas � �tancher ce dont il s'agit dans ce trou d'une perte centrale.

    Voil� ce qui r�gle les rapports du sujet avec 1'Autre, grand A, ce qui r�gle secr�tement mais d'une fa�on dont il est s�r qu'elle n'est pas moins efficace que ce rapport de petit a � la r�flexion imaginaire qui la couvre et la surmonte. Qu'en d'autres termes dans la route, la seule qui nous soit offerte pour retrouver l'incidence de ce petit a, nous rencontrons d'abord la marque de l'occultation de l'Autre, sous le m�me d�sir.

    Telle est en effet la voie : a peut �tre abord� par cette voie qui est ce que l'Autre, avec un grand A, d�sire dans le sujet d�faillant, dans le fantasme, le S barr�. C'est pourquoi je vous ai enseign� que la crainte du d�sir est v�cue comme �quivalente � l'angoisse, que l'angoisse c'est la crainte de ce que l'Autre d�sire en soi du sujet, cet "en soi" fond� justement sur l'ignorance de ce qui est d�sir� au niveau de l'Autre. C'est du c�t� de l'Autre que le petit a vient au jour, non pas comme manque tellement que comme � �tre.

    C'est pourquoi nous arrivons ici � poser la question de son rapport avec la chose, non pas sacr�e, mais ce que je vous ai appel� das Ding. Vous savez qu'en vous menant sur cette limite je n'ai rien fait que de vous indiquer qu'ici la perspective s'inversant, ce petit i de petit a qui enveloppe cet acc�s � l'objet de la castration, c'est ici l'image m�me qui fait obstacle dans le miroir, ou plut�t que, � la fa�on de ce qui se passe dans ces miroirs obscurs - il faut toujours penser � cette obscurit� chaque fois que dans les auteurs anciens vous voyez intervenir la r�f�rence du miroir - quelque chose peut appara�tre au-del� de l'image que donne le miroir clair. L'image du miroir clair, c'est � elle que s'accroche cette barri�re que j'ai appel�e en son temps celle de la beaut�. C'est qu'aussi bien la r�v�lation de petit a au-del� de cette image, m�me apparue sous la forme la plus horrible, en gardera toujours le reflet.

    Et c'est ici que je voudrais vous faire part du bonheur que j'ai (->p544) (XXVI/12) pu avoir � rencontrer ces pens�es sous la plume de quelqu'un que je consid�re tout simplement comme le chantre de nos lettres, qui a �t� incontestablement plus loin que quiconque pr�sent ou pass� dans la voie de la r�alisation du fantasme, j'ai nomm� Maurice Blanchot dont d�s longtemps l'arr�t de mort �tait pour moi la s�re confirmation de ce que j'ai dit toute l'ann�e, au s�minaire sur l'�thique concernant la seconde mort.

    Je n'avais pas lu la seconde version de son oeuvre premi�re "Thomas l'Obscur". Je pense qu'un aussi petit volume, nul d'entre vous, apr�s ce que je vais vous en lire, ne manquera de s'y �prouver. Quelque chose s'y rencontre qui incarne l'image de cet objet petit a, � propos duquel j'ai parl� d'horreur ; c'est le terme qu'emploie Freud quand il s'agit de l'Homme aux rats . Ici c'est du rat qu'il s'agit.

    Georges Bataille a �crit un long essai qui vire autour du fantasme central bien connu de Marcel Proust, lequel concernait aussi un rat "Histoire de rat". Mais ai-je besoin de vous dire que si Apollon crible l'arm�e grecque des fl�ches de la peste, c'est parce que, comme s'en est tr�s bien aper�u M. Gr�goire, si Esculape, comme je vous l'ai enseign� il y a longtemps, est une taupe - il n'y a pas si longtemps que je retrouvais le plan de la taupini�re dans une tolos (?) , une de plus, que j'ai visit� r�cemment - si donc Esculape est une taupe, Apollon est un rat.

    Voici. J'anticipe, ou plus exactement je prends un peu avant Thomas l'Obscur - ce n'est pas par hasard qu'il s'appelle ainsi - :

" Et dans sa chambre, ceux qui entraient, voyant son livre toujours ouvert aux m�mes pages, pensaient qu'il feignait de lire. Il lisait avec une minutie et une attention insurpassables. I1 �tait aupr�s de chaque signe dans la situation o� se trouve le m�le quand la mante religieuse va le d�vorer. L'un et 1'autre se regardaient. Les mots, issus d'un livre y prenaient une  puissance mortelle, exer�aient sur le regard qui les touchaient  un attrait doux et paisible. Chacun d'eux, comme un oeil � demi ferm�, laissait entrer le regard trop vif qu'en d'autres circonstances il n'e�t pas souffert.  Thomas se glissa donc vers ces couloirs dont il s'approcha  sans d�fense jusqu'� l'instant o� il fut aper�u par (->p545) (XXVI/13) l'intime du mot. Ce n'�tait pas encore effrayant, c'�tait au contraire un moment presque agr�able qu'il aurait voulu prolonger. Le lecteur consid�rait joyeusement cette petite �tincelle de vie qu'il ne doutait pas d'avoir �veill�e. I1 se voyait avec plaisir dans cet oeil qui le voyait ; son plaisir lui-m�me devint tr�s grand, il devint si grand, si impitoyable qu'il le subit avec une sorte d'effroi et que s'�tant dress�, moment insupportable, sans recevoir de son interlocuteur un signe complice, il per�ut toute l'�tranget� qu'il y avait � �tre observ� par un mot comme par un �tre vivant. Et non seulement par un mot, mais par tous ceux qui l'accompagnaient et qui � leur tour contenaient en eux-m�mes d'autres mots, comme une suite d'anges s'ouvrant � l'infini jusqu'� l'oeil de l'absolu".

    Je vous passe ces franchissements qui passent par ce "tandis que juch�s sur ses �paules le mot il et le mot je commen�aient leur carnage jusqu'� la confrontation � laquelle je visais, en vous �voquant ce passage .

"Ses mains cherch�rent � toucher un corps impalpable et irr�el. C'�tait un effort si horrible que cette chose qui s'�loignait de lui et en s'�loignant tentait de l'attirer, lui parut la m�me que ce11e qui indiciblement se rapprochait. Il tomba � terre. Il avait le sentiment d'�tre couvert d'impuret�s, chaque partie de son corps subissait une agonie, sa t�te �tait contrainte de toucher le mal, ses poumons de la respirer. Il �tait l� sur le parquet, se tordant puis rentrant en lui-m�me, puis sortant. I1 rampait lourdement, � peine diff�rent du serpent qu'il e�t voulu devenir pour croire au  venin qu'il sentait dans sa bouche. C'est dans cet �tat qu'il se sentit mordu ou frapp�, il ne pouvait le savoir, par ce qui lui sembla �tre un mot, mais qui ressemblait plut�t � un rat gigantesque, aux yeux per�ants, aux dents pures et qui �tait une b�te toute puissante. En la voyant � quelques pouces de son visage, il ne put �chapper au d�sir de la d�vorer, de l'amener � l'intimit� la plus profonde avec soi ; il se jeta sur elle et lui enfon�ant les ongles dans les entrailles, il chercha � la faire sienne . (->p546) (XXVI/14) La fin de la nuit vint. La lumi�re qui brillait � travers les volets s'�teignit. Mais la lutte avec l'affreuse b�te, qui s'�tait enfin r�v�l�e d'une dignit�, d'une magnificence incomparables, dura un temps qu'on ne peut mesurer. Cette lutte �tait horrible pour l'�tre couch� par terre qui grin�ait des dents, se labourait le visage, s'arrachait les yeux pour y faire entrer la b�te, et qui e�t ressembl� � un d�mon s'il n'avait ressembl� � un homme. Elle �tait presque belle pour cette sorte d'ange noir, couvert de poils roux, dont les yeux �tincelaient.

    "Tant�t l'un croyait avoir triomph� et il voyait descendre en lui, avec une naus�e incoercible , le mot innocence qui le souillait ; tant�t l'autre le d�vorait � son tour, l'entra�nait par le trou d'o� il �tait venu, puis le rejetait comme un corps dur et vide.

    "A chaque fois, Thomas �tait repouss� jusqu'au fond de son �tre par les mots m�mes qui l'avaient hant� et qu'il poursuivait comme son cauchemar et comme l'explication de son cauchemar. Il se retrouvait toujours plus vide et plus lourd, il ne remuait plus qu'avec une fatigue infinie. Son corps, apr�s tant de lutte, devint enti�rement opaque et � ceux qui le regardaient, il donnait l'impression reposante du sommeil bien qu'il n'eut cess� d'�tre �veill�.

    Vous lirez la suite.

    Et le chemin ne s'arr�te pas l�, de ce que Maurice Blanchot nous d�couvre. Si j'ai pris ici le soin de vous indiquer ce passage, c'est qu'au moment de vous quitter cette ann�e je veux vous dire que souvent j'ai conscience de ne rien faire d'autre ici que de vous permettre de vous porter avec moi au point o� autour de nous, multiples, parviennent d�j� les meilleurs.

    D'autres ont pu remarquer le parall�lisme qu'il y a entre telle ou telle des recherches qui se poursuivent � pr�sent et celles qu'ensemble nous �laborons. Je n'aurai aucune peine � vous rappeler que sur d'autres chemins, les oeuvres puis les r�flexions sur les oeuvres par lui-m�me d'un Pierre Klossowski convergent avec ce chemin de la recherche du (->p547) (XXVI/15) fantasme tel que nous l'avons �labor� cette ann�e.

    Petit i de petit a et petit a, leur diff�rence, leur compl�mentarit� et le masque que l'un constitue pour l'autre, voil� o� je vous aurai men�s cette ann�e. Petit i de petit a, son image n'est donc pas son image, elle ne le repr�sente pas, cet objet de la castration. Elle n'est d'aucune fa�on ce repr�sentant de la pulsion sur quoi porte �lectivement le refoulement. Et pour une double raison : c'est qu'elle n'est, cette image, ni la Vostellung puisqu'elle est e11e-m�me un objet, une image r�elle - reportez-vous � ce que j'ai �crit sur ce sujet dans mes Remarques sur le rapport de Daniel Lagache, - ni un objet qui n'est pas le m�me que petit a, qui n'est pas son repr�sentant non plus. i ( a)  et a

    Le d�sir, ne l'oubliez pas, dans le graphe o� se situe-t-il ? I1 vise S barr� coupure de a le fantasme, sous un mode analogue � celui du petit m o� le moi se r�f�re � l'image sp�culaire. Qu'est-ce � dire, sinon qu'il y a quelque rapport de ce fantasme au d�sirant lui m�me.  S <> a

    Mais pouvons-nous, de ce d�sirant, faire purement et simplement l'agent du d�sir ? N'oublions pas qu'au deuxi�me �tage du graphe, petit d, le d�sir est un "qui" qui r�pond � une question, qui ne vise pas un "qui", mais un "Che vuoi ?". A la question : "Che vuoi ?" le d�sirant est la r�ponse, la r�ponse qui ne d�signe pas le qui de "qui veut '. ", mais la r�ponse de l'objet. Ce que je veux dans le fantasme d�termine l'objet d'o� le d�sirant qu'il contient doit s'avouer comme d�sirant.

    Cherchez-le toujours, ce d�sirant, au sein de quelque objet que ce soit du d�sir, et n'allez pas objecter la perversion n�crophilique, puisque justement c'est l� l'exemple o� il se prouve qu'en-de�a de la seconde mort physique laisse encore � d�sirer et que le corps se laisse l� apercevoir comme enti�rement pris dans une fonction de signifiant, s�par� de lui-m�me et t�moignage de ce qu'�treint le n�crophile : une insaisissable v�rit�.

    Ce rapport de l'objet au signifiant, avant de vous quitter, revenons en au point o� ces r�flexions s'assoient, c'est-�-dire � ce que Freud lui-m�me a marqu� de l'identification du d�sir (chez l'hyst�rique entre parenth�ses ) au d�sir de l'Autre. L'hyst�rique nous montre en effet bien quelle est la distance de cet objet au signifiant, cette distance que j'ai d�finie par 1 carence du signifiant mais impliquant sa relation au signifiant. En effet, � quoi s'identifie l'hyst�rique quand, nous dit Freud c'est le d�sir de 1'Autre o� elle s'oriente et qui l'a mise en chasse.

(->p548) (XXVI/16)

    Et, c'est sur quoi les affecte nous dit-il , les �motions consid�r�es ici sous sa plume comme embrouill�es, si je puis m'exprimer ainsi, dans le signifiant, et reprises comme telles. C'est � ce propos qu'il nous dit que toutes les �motions ent�rin�es, les formes, si je puis dire conventionnelles de l'�motion, ne sont rien d'autre que des inscriptions ontog�niques de ce qu'il compare, de ce qu'i1 r�v�le  comme express�ment �quivalent � des acc�s hyst�riques, ce qui est retomber sur la relation au signifiant.

    Les �motions sont en quelque sorte des caduques du comportement, des parties chuos reprises comme signifiant. Et ce qui est le plus sensible, tout ce que nous pouvons en voir, se trouve dans les formes antiques de la lutte. Que ceux qui ont vu le film "Rashomon" se souviennent de ces �tranges interm�des qui soudain suspendent les combattants, qui vont chacun s�par�ment faire sur eux m�mes trois petits tours, faire � je ne sais quel point inconnu de l'espace, une paradoxale r�v�rence. Ceci fait partie de la lutte, de m�me que dans la parade sexuelle Freud nous apprend � reconna�tre cette esp�ce de paradoxe interruptif d'incompr�hension scansion.

    Les �motions, si quelque chose nous en est montr� chez l'hyst�rique, c'est justement quand e11e est sur la trace du d�sir, c'est ce caract�re nettement mim�, comme on dit hors saison, � quoi on se trompe et d'o� se tire l'impression de fausset�. Qu'est-ce � dire, si ce n'est que l'hyst�rique bien s�r ne peut pas faire autre chose que de chercher le d�sir de l'Autre l� o� il est, o� il laisse sa trace chez l'autre, dans l'utopie, pour ne pas dire l'atopie, la d�tresse, voir la fiction ; bref que c'est par la voie de la manifestation comme on peut s'y attendre, que se montrent tous les aspects symptomatiques. Et si ces sympt�mes trouvent cette voie fray�e, c'est en liaison avec ce rapport que Freud d�signe au d�sir de l'Autre.

    J'avais autre chose � vous indiquer concernant la frustration. Bien s�r, ce que je vous ai apport� cette ann�e concernant le rapport au corps, ce qui est seulement �bauch� dans la fa�on dont j'ai entendu dans un corps math�matique vous donner l'amorce de toutes sortes de paradoxes concernant l'id�e que nous pouvons nous faire du corps, trouve ses applications assur�ment bien faites pour modifier profond�ment l'id�e que nous pouvons avoir de la frustration comme d'une carence concernant une gratification se r�f�rant � ce qui serait une soi-disant totalit� primitive telle qu'on (->p549) (XXVI/17) voudrait la voir d�sign�e dans les rapports de la m�re et de l'enfant.

    Il est �trange que la pens�e analytique n'ait jamais rencontr� sur ce chemin sauf dans les coins comme toujours des observations de Freud - et ici je d�signe le mot Schleier - ce voile dont l'enfant na�t coiff� et qui tra�ne dans la litt�rature analytique sans qu'on n'ait m�me jamais song� que c'�tait l� l'amorce d'une voie tr�s f�conde : les stigmates.

    S'il y a quelque chose qui permette de concevoir comme comportant une totalit�, je ne sais quel narcissisme primaire - et ici je ne peux que regretter que se soit absent� quelqu'un qui m'a pos� la question c'est bien assur�ment la r�f�rence du sujet, non pas tant au corps de la m�re parasit�, mais � ces enveloppes perdues o� se lit si bien cette continuit� de l'int�rieur avec l'ext�rieur, qui est celle � quoi vous a introduit mon mod�le de cette ann�e, sur lequel nous aurons � revenir.

    Simplement je veux vous indiquer, parce nous le retrouverons dans la suite, que s'il y a quelque chose o� doit s'accentuer le rapport au corps, � l'incorporation, � l'Einverleibung, c'est du c�t� du p�re laiss� enti�rement de c�t� qu'il faut regarder.

    Je l'ai laiss� enti�rement de cot� parce qu'il aurait fallu que je vous introduise - mais quand 1e ferai-je - � toute une tradition qu'on peut appeler mystique et qui assur�ment, par sa pr�sence dans la tradition s�mitique, domine toute l'aventure personnelle de Freud.

    Mais s'il y a quelque chose qu'on demande � la m�re, ne vous parait-il pas frappant que ce soit la seule chose qu'elle n'ait pas, � savoir le phallus ? Toute la dialectique de ces derni�res ann�es, jusque et y compris la dialectique Kleinienne qui pourtant s'en approche le plus, reste fauss�e parce que l'accent n'est pas mis sur cette divergence essentielle. C'est aussi bien qu'il impossible de la corriger, impossible aussi de rien comprendre � ce qui fait l'impasse de la relation analytique, et tout sp�cialement dans la transmission de la v�rit� analytique telle qu'elle se fait, l'analyse didactique. C'est qu'il est impossible d'y introduire la relation au p�re, qu'on n'est pas le p�re de son analys� . J'en ai assez dit et assez fait pour que personne n'ose plus, au moins dans un entourage voisin du mien, risquer d'avancer qu'on peut en �tre la m�re. C'est pourtant de cela qu'il s'agit.

(->p550) (XXVI/18)

    La fonction de l'analyse telle qu'elle s'ins�re l� o� Freud nous en a laiss� la suite ouverte, la trace b�ante se situe l� o� sa plume est tomb�e � propos de l'article sur le splitting de l'Ego au point d'ambigu�t� o� l'am�ne ceci : l'objet de la castration est ce terme assez ambigu pour qu'au moment m�me o� le sujet s'est employ� � le refouler il l'instaure plus ferme que jamais, en un Autre.

    Tant que nous n'aurons pas reconnu que cet objet de la castration c'est l'objet m�me par quoi nous nous situons dans le champ de la science, je veux dire que c'est l'objet de notre science comme le nombre ou la grandeur peuvent �tre l'objet de la math�matique, la dialectique de l'analyse, non seulement sa dialectique, mais sa pratique, son rapport m�me et jusqu'� la structure de sa communaut� resterons en suspens.

 L'ann�e prochaine, je traiterai pour vous, comme poursuivant strictement le point o� je vous ai laiss�s aujourd'hui, l'angoisse.

note: bien que relu, si vous d�couvrez des erreurs manifestes dans ce s�minaire, ou si vous souhaitez une pr�cision sur le texte, je vous remercie par avance de m'adresser un [mailto:gaogoa@free.fr �mail]. [#J.LACAN Haut de Page] 
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