Text/Jacques Lacan/LF14061967.htm

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J.LACAN                    gaogoa

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XIV- La logique du fantasme. 1966-1967

version rue CB

14 Juin 1967                       [#note note]  

(p297->) Une analyse peut �tre interminable, mais pas un cours il faut bien qu'il ait une fin. Le dernier de cette ann�e aura lieu mercredi prochain.

    C'est donc aujourd'hui l'avant dernier. Cette ann�e j'ai choisi qu'il n'y ait pas de s�minaire ferm�, je fais n�anmoins place, au moins, je m'excuse si j'ai oubli� deux personnes qui m'ont apport� ici leur contribution, peut-�tre au d�but de cet avant dernier cours y aura-t-il quelqu'un d'entre vous, plusieurs, qui voudrez bien me dire peut-�tre sur quoi ils aimeraient, qui sait, mettre un peu plus d'accent, amorcer une reprise pour le futur, ceci soit dans cette avant-derni�re le�on, soit dans la derni�re. Je verrai si je peux y r�pondre aujourd'hui, je m'efforcerai au moins d'indiquer dans quel sens je peux r�pondre ou ne pas r�pondre. Bref, si quelques-uns d'entre vous voulaient bien ici, tout de suite, me donner quelques indications de leur v�ux et ce que j'ai pu leur laisser � d�sirer concernant le champ que j'ai articul� cette ann�e sur la logique du fantasme. Je leur en serais reconnaissant.

    Qui demande la parole ? (silence). N'en parlons plus pour l'instant, ceux qui auront l'esprit d'escalier pourront peut-�tre m'adresser un petit mot, mon adresse est dans l'annuaire, rue de Lille, je ne pense pas que vous aurez d'h�sitation, que je sache je suis le seul, au moins � cette place, � �tre rep�r� comme docteur Lacan.

    Je vais poursuivre au point o� nous avons laiss� les choses, et comme nous n'avons plus tr�s longtemps pour boucler ce qui peut passer pour former certains champs, cerner dans ce que j'ai dit cette ann�e, je vais m'efforcer de vous indiquer les derniers points de rep�re, de fa�on aussi simple que je le pourrai. Je vais essayer de faire simple, ceci suppose que je vous avertisse de ce que cette simplicit� peut vouloir dire. Vous voyez bien qu'au terme de cette logique du fantasme, terme suffisamment justifi� par le fait que je vais une fois de plus r�accentuer aujourd'hui que le fantasme c'est d'une fa�on bien plus �troite que tout le reste de l'inconscient structur� comme un langage puisqu'en fin de compte le fantasme c'est une phrase avec une structure grammaticale, semble indiquer donc d'articuler la logique du fantasme, ce qui veut dire par exemple poser un certain nombre de questions logiques qui pour simples qu'elles soient ont, certaines, �t� articul�es pas si souvent. Je ne dis pas pour la premi�re fois par moi, mais pour la premi�re fois par moi dans le champ analytique. Le rapport du sujet de l'�nonc� par exemple, (p->298) au sujet de l'�nonciation. �a n'exclut pas qu'au terme de ce premier d�brouillage, de cette indication, cette direction, donner du sens o� pourrait se d�velopper dans l'avenir de fa�on plus pleine, plus articul�e, plus syst�matique cette logique du fantasme, dont je pr�tends en avoir ouvert cette ann�e, le sillon.

    Non �a n'exclut pas, mais �a indique bien s�r que quelque part, cette logique du fantasme, s'accroche, s'ins�re, se suspend, � l'�conomie du fantasme, c'est bien pour �a qu'au terme de ce discours, j'ai amen� ce terme de la jouissance. Je l'ai en soulignant, en accentuant, que c'est l� un terme nouveau au moins dans la fonction que je lui donne, ce n'est pas un terme que Freud a mis au premier plan de l'articulation th�orique.

    Si mon enseignement en somme, pourrait trouver son axe, de la formule de faire valoir la doctrine de Freud, c'est bien l� quelque chose qui implique justement que j'y annonce, que j'y amorce, telle fonction, tel rep�re qui est en quelque sorte cern�, exig�, impliqu�. Faire valoir Freud c'est faire ce que je fais toujours, d'abord comme on dit, rendre � Freud ce qui est � Freud, ce qui n'exclut pas quelque autre all�geance, celle par exemple de le faire valoir au regard de ce qu'il indique de ce qui comporte de la relation � la v�rit�. Je dirai m�me que si quelque chose comme cela est possible, c'est pr�cis�ment dans la mesure o� je ne manque jamais de rendre � Freud ce qui est � Freud que je ne me l'approprie pas. C'est l� un point, qui a son importance, peut-�tre aurai-je le temps d'y revenir � la fin. Il est assez curieux de voir que pour certains c'est � s'approprier, je veux dire, � ne pas me rendre ce qu'ils me doivent le plus manifestement, tout un chacun peut s'en apercevoir, dans leur formulation, ce n'est pas �a qui est l'important, c'est quelque chose o� ce manque � me rendre les emp�che de faire le pas suivant, ce qui serait dans un champ pourtant bien facile, tout de suite au lieu, h�las, de me le laisser toujours � faire, d�sesp�r�s ensuite comme ils s'entends, que je leur ai coup� l'herbe sous le pied.

        Donc cette fonction , du  fantasme, approchons-l�, et d'abord pour nous apercevoir, dire simplement comme le d�part m�me de notre question, toute chose qui saute aux yeux, il est quelque chose de clos, qu'il se pr�sente � nous dans notre exp�rience, comme une signification form�e pour les sujets, qui d'habitude, le plus commun�ment, le plus coutumi�rement pour nous, le supporte, � savoir, le n�vros�. Qu'on note comme le fait Freud avec force dans l'examen exemplaire qu'il a fait d'un de ces fantasme : l'on bat un enfant, sur lequel j'ai d�j� fait, si vous vous en souvenez, quand j'ai introduit les premiers sch�mas cette ann�e, je vous conseille quand vous aurez rassembl� ce que vous avez pu prendre comme notes pour saisir le chemin qui aura �t� ici parcouru, que quelque chose de clos donc est � situer doublement dans ces deux termes que j'ai accentu�, l'un comme ce corr�latif du choix constitu� par le � je ne pense pas �, dans lequel � je � se constitue par le fait que le " je " justement vient en r�serve, si je puis dire, l'�cornage en n�gatif, dans la structure grammaticale, ce fantasme, non pas " on bat un enfant " mais pour �tre strict, " un enfant est battu ", comme il est �crit en allemand, le fantasme c'est (p299->) bien cette structure qu'au niveau du seul terme possible du choix tel qu'il est laiss� dans la structure de l'ali�nation, le choix du " je ne pense pas ", le fantasme appara�t comme cette phrase grammaticalement structur�e � ein kind ist geschlaben �.

     Mais comme je vous l'ai dit, cette structure, la seule qui nous soit offerte, le choix forc� au niveau de � l'o� je ne suis pas, ou je ne pense pas � si elle est l�, c'est dans la mesure o� elle peut �tre appel�e � d�voiler, l'autre, la rejeter, et qu'au niveau de l'Autre, celle du � je ne suis pas  �, c'est la bedeutung (signification) inconsciente qui vient corr�lativement mordre sur ce � je � qui est en tant que n'�tant pas, et  le rapport � cette bedeutung est pr�cis�ment cette signification en tant qu'elle �chappe, cette signification ferm�e, cette signification pourtant si importante � souligner en tant que si l'on peut dire, c'est elle qui donne la mesure de la compr�hension, la mesure accept�e, la mesure re�ue, l'intuition l'exp�rience qu'on interpelle quant � tenir ces discours de faux-semblant, qui  font appel � la compr�hension, comme oppos�e � l'explication, saintet� et vanit� philosophiques. M. Jaspers au premier rang. Le point des tripes o� il vous vise pour vous faire croire que vous comprenez des choses de temps en temps, c'est cela cette petite chose secr�te isol� que vous avez au dedans de vous sous la forme du fantasme et que vous croyez que vous comprenez parce qu'il �veille en vous la dimension du d�sir.

     C'est l� tout simplement ce dont il s'agit concernant ce qu'on appelle la compr�hension, et le rappeler a ici son importance, ce n'est pas parce que pour la majorit� que vous �tes un peu n�vros�s sur les bords, le fantasme vous donne la mesure de la compr�hension pr�cis�ment � ce niveau o� le fantasme �veille en vous le d�sir, ce qui n'est foutre pas rien car c'est ce qui centre votre monde. C'est pas pour �a qu'il faut que vous vous imaginiez que vous comprenez ce qui seul livre la logique du fantasme, � savoir : la perversion.

    Ne vous imaginez pas que le pervers, pour lui, le fantasme joue le m�me r�le, c'est en cela que j'essaie de vous expliquer l'enracinement de ce que fait le pervers qui ne saurait se d�finir que par rapport au terme que j'ai introduit �galement neuf de l'avoir accentu�, qui s'appelle : l'acte sexuel.

    Donc vous le voyez, il y a l� des connexions qu'il faut distinguer, articuler ce qu'il en est de la jouissance int�ress�e dans la perversion par rapport � la difficult�, ou � l'impasse de l'acte sexuel, c'est donner quelque chose qui a, par rapport au fantasme, tel qu'il nous est donn� � l'�tat ferm�, c'est pour cela que j'ai rappel� cet exemple de "on bat un enfant " dans le texte freudien, la fonction de ce fantasme qui ne peut comme tel pr�senter, n'�tre autre chose que strictement cette formule : " eine kind ist geschlafen ". Ce n'est pas parce qu'elle peut int�resser en ce sens qu'elle a une configuration que vous pouvez pointer, reporter sur l'�conomie de la jouissance perverse, en faisant correspondre tel des termes de l'un � des termes de l'autre qui n'est d'aucune fa�on de m�me nature.

(p300->) Il faut tout de suite rappeler ce point vif qu'il n'est pas difficile de ramasser au passage dans ce texte si clair de Freud c'est par exemple ceci qu'il  n'a pas une telle sp�cificit� dans les cas de n�vrose ou il l'a rencontr�.

    Dans la structure d'une n�vrose, ce fantasme pour prendre celui-l�, pour fixer notre attention, ce fantasme n'est pas li� sp�cifiquement � tel ou tel. Voil� bien quelque chose qui pourrait un instant tenir notre attention. Enfin pour ce qu'il en est de la structure des sympt�mes, je veux dire ce que signifient les sympt�mes dans l'�conomie, l� nous ne pouvons pas dire que �a s'arrange l� m�me chose dans une n�vrose ou dans une autre. Je ne le r�p�terai jamais trop, m�me si je semble �tonn�, aupr�s de ceux qui me font la confiance  de venir se faire contr�ler par moi. Je m'�l�ve par exemple avec force contre l'usage de termes comme ceux-ci par exemple : de structure hyst�ro-phobique.

    Pourquoi �a ? Ce n'est pas pareil une structure hyst�rique et une structure phobique, pas plus proche l'un de l'autre que de la structure obsessionnelle. Le sympt�me repr�sente une structure. C'est l� qu'est le point frappant, c'est que comme nous l'indique Freud dans des structures tr�s diff�rentes, ce fantasme peut �tre l� qui se ballade avec ce privil�ge d'�tre plus inavouable que quoi que ce soit, je lis Freud, je le r�p�te pour l'instant, inavouable comporte beaucoup de choses, on pourrait s'y arr�ter.

    En tous cas, pour rester au niveau d'approche grossi�re qui est  celui de l'an 1919 o� ceci a �t� �crit, disons qu'il est appendu comme une cerise sur un p�dicule de sentiment de culpabilit�.

        C'est l� ce � quoi Freud s'arr�te pour le mettre en rapport avec ce qu'il appelle une cicatrice, celle pr�cis�ment du complexe d'�dipe. Ceci est bien fait pour nous faire dire que pour la fa�on dont il a surgi dans notre exp�rience, le fantasme participe de l'aspect exp�rimental de corps �tranger que nous ayons �t� amen�s - ceci en raison de v�ritables bonds th�oriques de Freud � pressentir cette signification ferme dans des rapports de quelque chose d'autre bien plus d�veloppable , bien plus riche, virtualit�, qui s'appelle � proprement parler la perversion, ce n'est pas parce que Freud a fait ce saut tr�s vite, que nous ne devons pas omettre les distances, juste rapport, de nous interroger apr�s quand m�me beaucoup d'exp�rience acquise sur ce qu'il en est de la perversion.

    La perversion, donc, ai je dit, est quelque chose qui s'articule, se pr�sente, comme une voie d'acc�s propre � la difficult� qui s'engendre disons du projet, si vous mettez ce mot entre guillemets, c'est-�-dire qu'il n'est pas l� qu'analogique, je le fais intervenir comme une r�f�rence � un autre discours que le mien, de la mise en question pour �tre plus exact, se situe dans l'angle de ces deux termes : il n'y a pas, il n'y a que l'acte sexuel.

 (p301->) Il n'y a pas d'acte sexuel, ai je dit, pour autant que nous sommes capables d'en articuler les affirmations r�sultantes, ce qui ne veut pas dire bien s�r qu'il n'y ait pas quelque sujet qui y ait acc�d�, qui puisse dire l�gitimement, je suis un homme, je suis une femme. Nous analystes, c'est bien l� ce qui est frappant, c'est que nous ne sommes pas capables de le dire. Pourtant il n'y a que cet acte mis en suspens � ce niveau pour rendre compte de ce quelque chose qui apr�s tout, la chose non seulement est rest�e, mais reste encore ambigu� pour en �tre s�par�e qui s'appelle la perversion. Pourquoi ? c'est une perversion au sens absolu, au sens o� Aristote la prend par exemple quand il �carte Terence du champ de son �thique, un certain nombre de pratiques, qui peut-�tre, pourquoi pas, plus manifestes plus visibles, plus vivaces m�me dans son monde que dans le n�tre ; d'ailleurs, il ne faut pas croire qu'ils sont l� toujours. Savoir que l'exemple qu'il donne d'amour bestial, voire, si je me souviens bien, l'allusion au fait que je ne sais pas quel tyran de Phal�re si je me souviens bien, aimait assez faire passer quelques victimes, qu'elles fussent ou non amicales ou inamicales dans je ne sais quelle machine o� elles cuisaient � l'�tuv�e un certain temps. Ce n'est pas bien s�r pour nous un mod�le univoque, puisqu'en son �thique l'acte sexuel comme dans aucune �thique de la tradition philosophique grecque, l'acte sexuel n'a valeur centrale avou�e, patente, il nous reste � nous la lire, il n'en est pas de m�me pour nous, gr�ce au fait de l'inclusion du commandement juda�que dans notre morale.

    Assur�ment, avec Freud la chose est ferme, l'int�r�t que nous portons � la perversion sexuelle m�me si nous trouvons plus commode d'en rel�cher les cha�nes sous la forme de r�f�rence � je ne sais quel d�veloppement endog�ne, � je ne sais quel stade, que nous pr�tendons on ne sait pourquoi, biologique, il reste que la perversion ne prend sa valeur qu'� s'articuler � l'acte sexuel. Je dis � l'acte sexuel comme tel et c'est pour cela que j'ai choisi ce petit mod�le de la division incommensurable par excellence, de ce � a � le plus large � d�velopper son incommensurabilit� qui se d�finit par File:Le1.jpg et nous permet de l'inscrire et un sch�me sous la forme d'un double d�veloppement.  
                ............

     Ce qui reste de a se trouve comme par hasard �tre a2 = 1 - a  
 ............

     Vous aboutissez � une somme de puissances impaires qui se trouvent �gales � A 2 ..........

     Ce que vous avez vu se projeter dans le 1, � savoir le a, � gauche le a2 � droite se trouvent � la fin s�par�s d'une fa�on d�finitive dans une forme invers�e.

    Th�me cher, dont il nous serait facile, de montrer qu'elle peut repr�senter assez bien ce qui de l'acte sexuel pourrait pour nous se pr�senter d'une fa�on conforme au pressentiment de Freud, � savoir : r�alisable, seulement sous la forme de la sublimation. C'est pr�cis�ment dans la mesure o� cette voie et ce qu'elle (p302->) implique reste probl�matique et o� je l'exclus cette ann�e, car dire que cela peut se r�aliser sous la forme de la sublimation est s'�carter pr�cis�ment de ce � quoi nous avons � faire, c'est � savoir que dans son champ surgit structuralement toute la cha�ne de difficult�s qui se d�roulent, qui s'incluent d'une b�ance majeure, et d'une b�ance qui y reste qui est celle de la castration.

    C'est dans la mesure, l�-dessus vote commun des auteurs, de ceux qui en ont l'exp�rience, c'est clair, c'est au minimum peut-on dire, dans une voie qui est inverse de celle qui va � la but�e de la castration que s'articule ce qui est perversion.

     L'int�r�t de ce sch�ma est de montrer o� se mesure � a � projet� sur le un qu'il peut aussi se d�velopper d'une fa�on externe, � savoir : que le rapport de Kriz pobliz vesnice Rouchovany.jpg, ce rapport fondamental que d�signe le � a � qui veut dire A-1.jpg

Que ce dont il s'agit au niveau de la perversion est ceci : c'est que dans la mesure o� le Un pr�sum�, non pas de l'acte sexuel mais de l'union, du pacte sexuel, c'est dans la mesure o� ce Un est laiss� intact avec la partition, ne s'y �tablit pas, que le sujet dit pervers vient � trouver au niveau de cet irr�ductible, qui est de ce petit a originel sa jouissance. Ce qui le rend concevable est ceci : qu'il ne saurait y avoir d'acte sexuel non plus qu'aucun autre acte si ce n'est dans la r�f�rence signifiante qui seule peut le constituer comme acte. C'est cette r�f�rence signifiante ici,                 pas de ce seul fait deux entit�s naturelles le m�le et la femelle, du seul fait qu'elle domine, cette r�f�rence signifiante n'ordonne ces �tres que nous ne pouvons d'aucune fa�on maintenir � l'�tat d'�tres naturels, les introduit sous la forme d'une fonction de sujet, que cette fonction de sujet a pour effet la disjonction du corps et de la jouissance et que c'est l�, c'est au niveau de cette partition qu'intervient le plus typiquement la perversion.

    Ce qu'elle met en valeur, pour essayer de reconjoindre cette jouissance et ce corps s�par� de l'intention signifiante, c'est l� qu'elle se situe sur la voie d'une r�solution de la section de l'acte sexuel, c'est parce que, dans l'acte sexuel comme je vous l'ai montr� dans mon sch�ma de la derni�re fois, il y a pour quelque soit des deux partenaires lequel, une jouissance, celle de l'autre, qui reste en suspens, c'est parce que l'entrecroisement, la chiasme exigible qui feraient de plein droit de chacun des corps la m�taphore de signifiant de la jouissance de l'autre, c'est parce que ce chiasme est en suspens, que nous ne pouvons de quelque c�t� que nous l'abordions que voir ce d�placement qui, en effet, met une jouissance dans la d�pendance du corps de l'autre, moyennant quoi la jouissance de l'autre reste � la d�rive.

    L'homme pour la raison structurale qui fait que c'est sur la sienne de jouissance qu'est pris un pr�l�vement qui l'�l�ve � la fonction d'une valeur de jouissance. L'homme se trouve plus �lectivement que la femme pris dans les (p303->) cons�quences de cette soustraction structurale d'une part de sa jouissance. L'homme est effectivement le premier � supporter la r�alit� de ce trou introduit dans la jouissance. C'est bien pourquoi aussi, c'est lui, pour lequel cette question de la jouissance est non pas bien s�r du plus de poids, c'est tout autant pour son partenaire, mais tel qu'il peut y donner des solutions articul�es.

    Il le peut � la faveur de ceci : qu'il y a dans la nature de cet autre qui s'appelle le corps, quelque chose qui redouble cette ali�nation qui est de la structure du sujet, ali�nation de la jouissance. A c�t� de l'ali�nation subjective, je veux dire d�pendante, de l'introduction de la fonction du sujet qui porte sur la jouissance, il y en a une autre qui est celle qui est incarn�e dans la fonction de l'objet " a ".

     Eurydice, si l'on peut dire, deux fois perdue, la jouissance, cette jouissance que le pervers retrouve, o� va-t-il la retrouver ? Non pas dans la totalit� de son corps, celle o� une jouissance est parfaitement convenable et peut-�tre exigible, mais o� il est clair que c'est l� qu'elle fait probl�me quand il s'agit de l'acte sexuel, la jouissance de l'acte sexuel ne saurait d'aucune fa�on se comparer � celle que peut �prouver le coureur de cette d�marche libre et alti�re nulle part plus que dans le champ de la jouissance sexuelle, et ce n'est pas pour rien que c'est l� qu'elle appara�t pr�valente nulle part plus dans ce champ le principe du plaisir qui est proprement la limite, l'achoppement, le terme mis � toute forme qui se situe comme d'exc�s de la jouissance. Nulle part, il n'appara�t mieux que la loi de la jouissance est soumise � cette limite et que c'est l� que va se trouver tout sp�cialement pour l'homme en tant que j'ai dit d�j� que pour lui le complexe de castration articule d�j� le probl�me, va trouver son champ, je veux dire qu'il est des objets qui dans le corps se d�finissent d'�tre en quelque sorte au regard du principe du plaisir hors corps.

     C'est l� ce que sont les objetsa �. Le � a � est ce quelque chose d'ambigu qui si peu qu'il soit du corps de l'objet m�me individuel, c'est dans le champ de l'autre et pour cause, parce que c'est l� le champ o� se dessine le sujet, c'est l� � en faire la requ�te � en trouver la trace, le sein, cet objet dont il faut bien le d�finir comme �tant ce quelque chose qui pour �tre plaqu�, accroch� comme en surface, comme parasitairement � la fa�on d'un placenta, reste ce quelque chose que peut l�gitimement revendiquer comme son appartenance, le corps de l'enfant.

    On le voit bien l'appartenance �nigmatique, bien s�r autant que par un accident de l'�volution des �tres vivants, il appara�t qu'ainsi pour certains d'entre eux, quelque chose d'eux reste appendu au corps de l'�tre qui les a engendr�, et puis les autres : nous l'avons dit, l'excr�ment, � peine besoin de souligner ce qu'il a au regard du corps de marginal, et non pas sans �tre tr�s li� � son fonctionnement, il est assez clair de voir dans tout son poids ce que les �tres vivants ajoutent au domaine naturel de ces produits de leurs fonctions. Ceux que j'ai d�sign�s sous les termes du regard et de la voix.

(p304->) Cherchons pour le premier de ces deux termes, ayant d�j� articul� abondamment ce que comporte le fait que dans le rapport de vision la question reste toujours suspendue, qui est celle, si simple � articuler, dont on peut dire malgr� tout, l'abord ph�nom�nologique comme le prouve la derni�re oeuvre de Merleau Ponty, on ne peut pas le r�soudre, c'est � savoir ce qu'il en est de cette racine divisible laquelle doit �tre retrouv�e la question de ce qu'est radicalement le regard. Le regard qui ne peut plus �tre saisi comme reflet du corps qu'aucun des autres objets en question ne peut �tre ressaisi dans l'�me, je veux dire dans cette esth�sie r�gulatrice du principe du plaisir, dans cette esth�sie repr�sentative o� l'individu se trouve identifi� � lui-m�me dans le rapport narcissique o� il s'affirme comme individu. Ce reste, qui ne surgit que du moment o� est con�ue la limite que fonde le sujet, ce reste qui s'appelle l'objeta �, c'est l� que se r�fugie la jouissance qui ne tombe pas sous le coup du principe du plaisir. C'est aussi, l�, c'est d'�tre l�, c'est de ce que le Dasein non seulement du pervers mais de tout sujet est � situer dans cet hors corps, dans cette partie que dessine d�j� ce quelque chose de pressentiment qu'il y a quelque part dans le filet de ce passage que je vous ai demand� d'aller rechercher, que Socrate appelle dans la relation de l'�me au corps, cette partie anesth�sique, c'est dans cette partie anesth�sique que la jouissance g�t comme le montre la structure de 1a position du sujet dans ces deux termes exemplaires qui sont d�finis comme celui du sadique et du masochiste pour vous apprivoiser avec cette voie d'acc�s.

    Ai-je besoin d'�voquer la marionnette la plus �l�mentaire de ce que nous pouvons imaginer de l'acte sadique, � ceci pr�s, que j'ai pris au d�part mes garanties que je vous demande de bien saisir, que l� je vous demande de vous arr�ter � autre chose qu'� ce que pour vous, je l'ai dit plus ou moins vacillant sur les bords de la n�vrose, peut �veiller en vous une empathie le moindre petit fantasme de cet ordre, il ne s'agit pas de comprendre ce que peut avoir d'�mouvant telle pratique imagin�e ou pas.

    Il s'agit d'articuler ceci, qui vous �vitera de poser des questions sur l'�conomie dans cette fonction de la douleur par exemple, sur lequel on a fini j'esp�re de se casser la t�te, ce avec quoi joue le sadique, c'est avec le sujet dirons nous.

    Je ne vais pas faire l�-dessus de prosopop�e, j'ai d�j� �crit l�-dessus quelque chose qui s'appelle : Kant avec Sade, pour montrer qu'ils sont de la m�me veine. Ils jouent avec le sujet, quel sujet ? le sujet dirai-je, comme j'ai dit quelque part qu'on est sujet � la pens�e ou sujet au vertige, le sujet � la jouissance. Ce qui vous le voyez bien introduit cette inflexion qui du sujet nous fait passer � ce que j'ai marqu� comme en �tant le reste, � l'objet � a �.

    C'est au niveau de lAutre qu'il op�re cette subversion en r�glant je dis en r�glant - ce que depuis toujours les philosophes ont senti comme digne de qualifier ce qu'ils appelaient d�daigneusement les rapports du corps � l'�me et (p305-> qui dans Spinoza s'appelle de son vrai nom : titillation, le chatouillement. Il jouit du corps de lAutre apparemment, mais vous voyez bien que la question est � d�placer au niveau de celle qui est ce que j'ai formul� dans un champ o� les choses sont moins captivantes, que j'ai imag�es sous ce rapport du Ma�tre et de l'Esclave en demandant, ce dont on jouit, cela jouit-il ?

        Voyez bien le rapport imm�diat avec le champ de l'acte sexuel. Seulement, la question au niveau du sadique est celle-ci : c'est qu'il ne sait pas que c'est � cette question en tant que telle qu'il est attach� qu'il en devient l'instrument pur et simple qu'il ne sait pas ce qu'il fait lui-m�me comme sujet. Il est essentiellement dans la Verleunung qu'il peut l'interpr�ter de mille fa�ons, je ne vous demande pas de le faire. Il faut bien s�r qu'il ait quelque puissance articulante, ce qui f�t le cas du Marquis de Sade, moyennant quoi l�gitimement son nom reste attach� � la chose.

    Sade reste essentiel pour avoir bien marqu� les rapports de l'acte sadique � ce qu'il en est de la jouissance et pour avoir quand il en a tent� d�risoirement d'articuler la loi sous la forme d'une r�gle universelle digne des articulations de Kant dans ce morceau c�l�bre : " Fran�ais encore un effort pour �tre R�publicains ", objet de mon commentaire, l'article que j'ai �voqu� tout � l'heure, montrait que cette loi ne saurait articuler qu'en termes non pas de jouissance du corps, mais de partie du corps.

    Chacun dans cet �tat fantasmatique qui serait fond� sur le droit � la jouissance, chacun �tant tenu d'offrir � quiconque en marque le dessein, la jouissance de telle partie, �crit l'auteur ce n'est pas l� en vain, de son corps.

    Le refuge de la jouissance � cette partie dont le sujet sadique ne sait pas que c'est �a qui est � lui son Dasein, qu'il en r�alise l'essence, voil� ce qui est donn� comme cl� par le texte de Sade. Bien s�r, je n'ai pas le temps de r�articuler ce qui r�sulte de cette reprise, de ce reclassement, l'un par rapport � l'autre de la jouissance et du Sujet, et combien proche elle est du fantasme bien entendu, imm�diatement articul� par Sade, de la jouissance l� o� elle est port�e � l'absolu dans l'Autre, dans ce 1 la jouissance laiss�e sans support, celle dont il s'agit et pour laquelle Sade doit construire cette figure la plus manifestement vraisemblable de Dieu, celle de la jouissance d'une m�chancet� absolue.

     Ce mal essentiel, et souverain dont alors et alors seulement, apport� par la logique du fantasme, Sade avoue que le sadique n'est que le servant, qu'il doit au mal radical que constitue la nature frayer les voies d'un maximum de destruction. Mais ne l'oublions pas, il ne s'agit que de la logique de la chose. Si je l'ai d�velopp�, ou indiqu� de vous reporter � ses sources dans le caract�re si manifestement futile, bouffon, dans le caract�re toujours mis�rablement avort� des entreprises sadiques, c'est parce que c'est � partir de cette apparence que s'en fera mieux voir la v�rit� qui est proprement donn�e par la pratique masochiste o� (p306->) il est l� �vident que le masochiste pour soutirer, si l'on peut dire, d�rober, au seul coin o� manifestement il est saisissable, qui est l'objet � a � , se livre lui d�lib�r�ment � cette identification, � cet objet comme rejet�. II est moins que rien, m�me pas animal, l'animal qu'on maltraite, et aussi bien sujet qui de sa fonction de sujet a abandonn� par contraste tous les privil�ges.

    Cette recherche, cette construction, en quelque sorte acharn�e de l'identification impossible avec ce qui se r�duit au plus extr�me du d�chet, et que ceci soit li� pour lui � la captation de la jouissance, voil� o� appara�t exemplaire l'�conomie dont il s'agit.

    Observons, sans nous arr�ter aux vers sublimes qui humanisent si je puis dire, cette man�uvre, " tandis que des mortels la multitude vile sous le fouet du plaisir, le bourreau sans merci va cueillir des remords dans la f�te servile..." Tout �a c'est de la blague ! C'est le reflet port� sur la loi du plaisir. Le plaisir n'est pas un bourreau sans merci, le plaisir vous maintient dans une limite assez tamponn�e pr�cis�ment pour �tre le plaisir.

    Ce dont il s'agit, quand le po�te s'exprime ainsi, c'est pr�cis�ment pour marquer sa distance � ma douleur donne moi la main, viens par ici, loin d'eux.. � etc. Chant de fl�te pour nous montrer les charmes d'un certain chemin qui s'obtient par ces couleurs ainsi invers�es.

    Si nous avons � faire au masochisme sexuel, observons la n�cessit� de notre sch�ma, ce que Reich souligne avec une maladresse qu'on peut vraiment dire � nous faire tourner la t�te, du caract�re imaginaire ou fantaisiste du masochisme, il n'a pas saisi encore que tout ce qu'il apporte d�signe suffisamment que ce dont il s'agit est � savoir ce que nous avons projet� : le 1 absolu de l'union sexuelle pour autant que d'une part elle est cette jouissance pure, mais d�tach�e du corps f�minin, si Sacher Masoch aussi exemplaire que l'autre � nous avoir livr� du rapport masochiste toutes les structures qu'incarne dans la figure d'une femme cet autre, auquel il a � d�rober sa jouissance, cet autre, jouissance absolue, mais jouissance compl�tement �nigmatique. II n'est pas un instant question m�me que cette jouissance puisse � la femme si je puis dire, lui faire plaisir. C'est bien le cadet des soucis du masochiste, c'est bien pourquoi sa femme, affubl�e du nom de Wanda, la V�nus aux fourrures, sa femme quand elle �crit ses m�moires nous montre � quel point de ses requ�tes elle est � peu pr�s aussi embarrass�e qu'un poisson d'une pomme.

    Par contre, � quoi bon se casser la t�te sur le fait que cette jouissance est purement imaginaire, il faut qu'elle soit incarn�e � l'occasion par un couple n�cessit� qui se manifeste de la structure de cet autre, en tant qu'il n'est que le rabattement de cet 1 non encore r�parti dans la division sexuelle.

(p307->On a pas � se casser la t�te � entrer dans des �vocations oedipiennes pour voir qu'il est n�cessaire, que cet �tre qui repr�sente cette jouissance mythique, que je r�f�re ici � la jouissance f�minine, soit � l'occasion repr�sent� par deux partenaires pr�tendus sexuels qui sont l� pour le th��tre, le guignol et alternent. Le masochiste donc d'une fa�on manifeste se situe et ne peut se situer que par rapport � une repr�sentation de l'acte sexuel et d�finit par sa place, le lieu o� s'en r�fugie la jouissance.

    C'est m�me ce que �a a de d�risoire et �a n'est pas simplement d�risoire pour nous, c'est d�risoire pour lui, c'est par l� que s'explique ce double aspect de d�rision, je veux dire, vers l'exp�rience en tant que jamais il ne manque de mettre dans la mise en sc�ne comme l'a remarqu� M. Jean Gen�t, cette petite chose qui marque, non pas pour un public �ternel, mais pour que quiconque survenant ne s'y trompe pas, �a fait partie de la jouissance, que tout �a c'est du truc, voire de la rigolade.

    Cette autre face qu'on peut appeler moquerie, qui est tourn�e vers lui-m�me, il suffit d'avoir lu (puisque vous l'avez maintenant � votre port�e) la suite de l'admirable pr�sentation de G. Deleuze : la V�nus aux fourrures, vous voyez ce moment o� ce personnage, quand m�me un peu seigneur, qu'�tait Sacher Masoch, imagine le personnage de son roman dont il fait lui un grand seigneur, qui pendant qu'il joue le r�le de valet va courrater derri�re sa dame a toutes les peines du monde � ne pas �clater de rire encore qu'il prenne l'air le plus triste possible. Il ne retient qu'avec peine son rire. C'est encore introduire comme essentiel ceci le c�t� que j'appellerai, qui a aussi frapp�, quand il en rend pleinement compte, Reich � ce propos, le c�t� d�monstration de la chose fait partie de cette position du masochiste, qu'il d�montre comme moi au tableau, �a a la m�me valeur, que l� seulement est le lieu de la jouissance. �a fait partie de sa jouissance que de le d�montrer. Et la d�monstration n'est pas pour cela moins valable.

    La perversion tout enti�re a toujours cette dimension d�monstrative, je veux dire, non pas qu'elle d�montre pour nous, mais que le pervers est lui-m�me d�monstrateur, c'est lui qui a l'intention, c'est pas la perversion, bien s�r.

    Voil� � partir de quoi peuvent se poser sainement les questions de ce qu'il en est de ce que nous appelons plus ou moins prudemment le masochisme moral. Avant d'introduire le terme de masochiste, � chaque tournant de nos propos, il faut d'abord avoir bien compris ce qu'est le masochisme au niveau du pervers. Je vous ai suffisamment indiqu� que dans la n�vrose ce par quoi on est reli� � la perversion qui n'est rien d'autre que ce fantasme qui, � l'int�rieur de son champ, � elle, n�vrose, remplit une fonction bien sp�ciale sur laquelle semble-t-il on ne s'est jamais interrog�. C'est uniquement � partir de l� que nous pourrons donner juste valeur � ce que nous introduirons � plus ou moins juste titre, dans tel tournant de la n�vrose en l'appelant masochisme.

(p308->) Je suis pris de cours aujourd'hui, et de ne pouvoir continuer sur la n�vrose cass�e en deux, si aujourd'hui j'ai bien articul� ce qui fait le ressort de la perversion en elle-m�me et du m�me coup vous ai montr� que le sadisme n'est nullement � voir comme un retournement du masochisme, car il est clair que tous les deux op�rent de la m�me fa�on, � ceci pr�s, que le sadique op�re d'une fa�on plus na�ve, intervenant sur le champ du sujet en tant qu'il est sujet � la jouissance le masochiste apr�s tout, sait bien que peu lui chaut de ce qui se passe au champ de lautre, bien s�r, il faut que lautre se pr�te au jeu, mais lui sait la jouissance qu'il a � soutirer.

    Pour le sadique, il se trouve en v�rit�, serf de cette n�cessit� de ramener sous le joug de la jouissance- ce qu'il vise comme �tant le sujet. Mais il ne se rend pas compte que dans ce jeu il est lui-m�me la dupe se faisant certes quelque chose qui est tout entier hors de lui et la plupart du temps restant � mi-chemin de ce qu'il vise, mais par contre ne manquant pas de r�aliser en fait, sans chercher, sans s'y placer la fonction de l'objet " a ", c'est-�-dire d'�tre objectivement r�ellement, dans une position masochique comme la biographie de notre divin Marquis, je l'ai soulign� dans mon article, nous le d�montre, quoi de plus masochiste que de s'�tre enti�rement remis entre les mains de la Marquise de Merteur ?

note : bien que relu, si vous d�couvrez des erreurs manifestes dans ce s�minaire, ou si vous souhaitez une pr�cision sur le texte, je vous remercie par avance de m'adresser un [mailto:gaogoa@free.fr �mail]. [#J.LACAN
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]  ( relu ce 21-11-2004 )
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