Text/Jacques Lacan/OP15121971.htm

From No Subject - Encyclopedia of Psychoanalysis
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J.LACAN                                 gaogoa

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s�minaire XIX- ...Ou Pire    1971-1972
       
    version rue CB                                [#note note]

15 d�cembre 1971

(p17->)

  On m�a donn� ce matin, on m�a apport� ce matin, on m�a fait cadeau ce matin de �a, d�un petit stylo. Si vous saviez ce que c�est  facile pour moi de trouver un stylo qui me plaise, eh bien, vous sentiriez combien �a m�a fait plaisir et la personne qui me l�a apport�, qui est peut-�tre l�, je la remercie. C�est une personne... qui m�admire, comme on dit ! Moi, je m�en fous, qu�on m�admire. Ce que j�aime, c�est qu�on me traite bien ! Seulement, m�me parmi celles-l�, �a arrive rarement. Bon ! Quoi qu�il en soit, je m'en suis tout de suite servi pour �crire et c�est de l� que partent mes r�flexions.

    C�est un fait que � au moins pour moi � c�est quand j��cris que je trouve quelque chose. Ca ne veut pas dire que si j��crivais pas, je ne trouverais rien. Mais enfin je m�en apercevrais peut-�tre pas. En fin de compte, l�id�e que je me fais de cette fonction de l��crit qui, gr�ce � quelques petits malins, est � l�ordre du jour et sur quoi enfin je n�ai peut-�tre pas trop voulu prendre parti � mais on me force la main, pourquoi pas ? � l�id�e que je m�en fais, en somme � et c�est �a qui peut-�tre dans certains cas a pr�t� � confusion � je vais le dire comme �a, tout cru, tout massif, parce que, aujourd�hui justement, je me suis dit que l��crit, �a peut �tre tr�s utile pour que je trouve quelque chose, mais �crire quelque chose pour m��pargner ici, disons, la fatigue ou le risque ou bien d�autres choses encore que je veuille vous parler, �a ne donne pas finalement de tr�s bons r�sultats. Il vaut mieux que je n�aie rien � vous lire. D�ailleurs, ce n�est pas la m�me sorte d��crit qui est l��crit o� je fais quelques trouvailles de temps en temps ou l��crit o� je peux pr�parer ce que j�ai � dire ici. Puis alors il y a aussi l��crit pour l�impression, qui est encore tout � fait autre chose, qui n�a aucun rapport, ou plus exactement dont il serait f�cheux de croire que ce que je peux avoir �crit une fois pour vous parler, �a constitue un �crit tout � fait recevable et que je recueillerais. Donc, je me risque � dire quelque chose, comme �a, qui saute le pas. L�id�e que je me fais de l��crit, pour le situer, pour partir de l�, on pourrait discuter apr�s, bon enfin, disons-le, deux points : c�est le retour du refoul�.

    Je veux dire que c�est sous cette forme � et c�est �a qui peut-�tre a pu pr�ter � confusion dans certains de mes �crits pr�cis�ment � c�est que si j�ai pu parfois para�tre pr�ter � ce qu�on croie que j�identifie le signifiant et la lettre, c�est justement parce que c�est en tant que lettre qu�il me touche le plus, moi, comme analyste, c�est en tant que lettre que le plus souvent je le vois revenir, le signifiant, le signifiant refoul� pr�cis�ment. Alors, que je l�image dans " l'Instance de la Lettre ", enfin, avec une lettre, ce signifiant � et d�ailleurs, je dois dire que c�est d�autant plus l�gitime que tout le monde fait comme , la premi�re fois qu�on entre � proprement parler dans la logique, il s�agit d�Aristote et des Analytiques, ben, on se sert de la lettre aussi, pas tout � fait de la m�me fa�on que celle dont la lettre revient � la place du signifiant qui fait retour. Elle vient l� pour marquer une place, la place d�un signifiant qui, lui, est un signifiant qui tra�ne, qui peut tout au moins tra�ner partout. Mais on voit que la lettre, elle est faite en quelque sorte pour �a et on (p18->) s�aper�oit qu�elle est d�autant plus faite pour �a que c�est comme �a qu�elle se manifeste d�abord.

    Je ne sais pas si vous vous rendez bien compte, mais enfin j�esp�re que vous y penserez, parce que �a suppose quand m�me quelque chose qui n�est pas dit dans ce que j�avance. Il faut qu�il y ait une esp�ce de transmutation qui s�op�re du signifiant � la lettre, quand le signifiant n�est pas l�, est � la d�rive, n�est-ce pas, a foutu le camp, dont il faudrait se demander comment �a peut se produire. Mais ce n�est pas l� que j�ai l�intention de m�engager aujourd�hui, j�irai peut-�tre un autre jour.

    Tout de m�me on ne peut pas faire que, sur le sujet de cette lettre, on n�ait affaire, dans un champ qui s�appelle math�matique, � un endroit o� on ne peut pas �crire n�importe quoi. Bien s�r, ce n�est pas... je ne vais pas non plus m�engager l�-dedans. Je vous fais simplement remarquer que c�est en �a que ce domaine se distingue et que c�est m�me probablement �a qui constitue ce en quoi je n�ai pas encore fait allusion ici, c�est-�-dire ici, au s�minaire, mais enfin que j�ai amen� dans quelques propos o� sans doute certains de ceux qui sont ici ont assist�, � savoir � Sainte-Anne, quand je posais la question de ce qu�on pourrait appeler un math�me, en posant d�j� que c�est le point pivot de tout enseignement, autrement dit qu�il n�y a d�enseignement que math�matique, le reste est plaisanterie.

    Ca tient bien s�r � un autre statut de l��crit que celui que j�ai donn� d�abord. Et la jonction enfin, en cours de cette ann�e de ce que j�ai � vous dire, c�est ce que j�essaierai de faire.

    En attendant, ma difficult�, celle en somme o� malgr� tout je tiens � je sais pas si ça vient de moi ou si c�est pas plut�t par votre concours � ma difficult� c�est que mon math�me � moi, vu le champ du discours que j�ai � �tablir, il confine toujours � la connerie. Ca va de soi avec ce que je vous ai dit puisqu�en somme, ce dont il s�agit, c�est que le rapport sexuel, il y en a pas � il faudrait l��crire : H-I-H-A-N et app�t avec deux p, un accent circonflexe et un t � la fin H-I-H-A-N A-P-P-A-T. Il ne faut pas confondre naturellement : H I H A N A P P A T, des relations sexuelles, il n�y a que �a, mais des rencontres sexuelles, c�est toujours rat�, m�me et surtout quand c�est un acte. Bon, enfin, passons...

    C�est �a qui m�a tout de m�me attir� une remarque comme �a ; j�aimerais, pendant qu�il en est encore temps, que, parce qu�on aura � le voir, on aura tout au moins � voir des choses autour... c�est une tr�s bonne introduction, c�est quelque chose d�essentiel, c�est la M�taphysique d�Aristote. Je voudrais vraiment que vous l�ayez lu... pour faire enfin que quand j�y viendrai, je sais pas, au d�but du mois de mars, pour y voir le rapport avec notre affaire � nous, il faudrait que vous ayez bien lu �a. Naturellement c�est pas de �a que je vous parlerai. C�est pas que je n�admire pas la connerie, je dirai plus : je me prosterne. Vous, vous ne vous prosternez pas, vous �tes des �lecteurs conscients et organis�s, vous ne votez pas pour des cons, c�est ce qui vous perd. Un heureux syst�me politique devrait permettre � la connerie d�avoir sa place et d�ailleurs les choses ne vont bien que quand c�est la connerie qui domine. Ceci dit, ce n�est pas une raison pour se prosterner. Donc, le texte que je prendrai, (19->)c�est quelque chose qui est un exploit, et un exploit comme il y en a beaucoup qui sont, si je puis dire, inexploit�s, c�est 1e Parm�nide de Platon, qui nous rendra service.

    Mais pour bien le comprendre, pour comprendre le relief qu�il y a à ce texte pas con, il faut avoir lu la M�taphysique d�Aristote. Et j�esp�re � j�esp�re parce que, quand je conseille qu�on lise la Critique de la raison pratique comme un roman, c�est quelque chose de plein d�humour, je ne sais pas si personne a jamais suivi ce conseil et a r�ussi � le lire comme moi ; on m�en a pas fait part, c�est quelque part dans le " Kant avec Sade " dont je sais jamais si personne l�a lu � alors je vais faire pareil, je vais vous dire : lisez la m�taphysique d�Aristote, et j�esp�re que, comme moi, vous sentirez que c�est vachement con. Enfin, je ne voudrais pas m��tendre longtemps l�-dessus, c�est comme �a des petites remarques lat�rales, bien s�r, qui me viennent, �a ne peut que frapper tout le monde quand on le lit, quand on lit le texte, bien sur.

    Il s�agit pas de la M�taphysique d�Aristote, comme �a, dans son essence, dans le signifi�, dans tout ce qu�on vous a expliqu� � partir de ce magnifique texte, c�est-�-dire tout ce qui a fait la m�taphysique pour cette partie du monde o� nous sommes, car tout est sorti de l�, c�est absolument fabuleux. On parle de la fin de la m�taphysique, au nom de quoi ? Tant qu�il y aura ce bouquin, on pourra toujours en faire ! Ce bouquin, c�est un bouquin, c�est tr�s diff�rent de la m�taphysique, c�est un bouquin " �crit " dont je parlais tout � l�heure. On lui a donn� un sens qu�on appelle la m�taphysique, mais il faut quand m�me distinguer le sens et le bouquin. Naturellement une fois qu�on lui a donn� tout ce sens, c�est pas facile de retrouver le bouquin. Si vous le retrouvez vraiment, vous verrez ce que tout de m�me des gens qui ont une discipline, et qui existe, et qui s�appelle la m�thode historique, critique, ex�g�tique, tout ce que vous voudrez, qui sont capables de lire le texte �videmment avec une certaine fa�on de se barrer du sens, et quand on regarde le texte, eh bien, �videmment il vous vient des doutes. Je dirai que, comme bien entendu, parce que... cet obstacle de tout ce qu�on en a compris, �a ne peut exister qu�au niveau universitaire et que l�universit� n�existe pas depuis toujours, enfin dans l�Antiquit�, trois ou quatre si�cles apr�s Aristote, on a commenc� � �mettre les doutes naturellement les plus s�rieux sur ce texte, parce qu�on savait encore lire, on a �mis des doutes, on a dit de �a que c�est des s�ries de notes ou bien que c�est un �l�ve qui a fait �a, qui a rassembl� des trucs. Je dois dire que je ne suis pas convaincu du tout, c�est peut-�tre parce que je viens de lire un bouquin d�un nomm� Michelet � pas le n�tre, pas notre po�te ; quand je dis notre po�te, je veux dire par l� que je le place tr�s haut, le n�tre �, c�est un type comme �a qui �tait � l�Universit� de Berlin, qui s�appelait Michelet lui aussi, qui a fait un livre sur la M�taphysique d�Aristote, pr�cis�ment l�-dessus. Parce que la m�thode historique qui florissait alors l�avait un peu taquin� avec les doutes �mis. non sans fondement puisqu�ils remontent � la plus haute Antiquit�. Je dois dire que Michelet n�est pas de cet avis et moi non plus.

    Parce que vraiment, comment dirais-je, la connerie fait preuve pour ce qui est de l�authenticit�. Ca qui domine, c�est l�authenticit�, si je puis dire, de la connerie. Peut-�tre que ce terme � authentique qui est tou-(p20->)jours un petit peu compliqu� chez nous, comme �a, avec des r�sonances �tymologiques grecques, il y a des langues o� il est mieux repr�sent�, c�est " echt ", je sais pas comment avec �a on fait un nom, �a doit �tre l�Echtigkeit ou quelque chose comme �a, qu�importe. Il y a tout de m�me rien d�authentique que la connerie. Alors cette authenticit�, c�est peut-�tre pas l�authenticit� d�Aristote, mais la M�taphysique � je parle du texte � c�est authentique, ça ne peut pas �tre fait de pi�ces ou de morceaux, c�est toujours � la hauteur de ce qu�il faut bien maintenant que j�appelle, que je justifie de l�appeler la connerie, la connerie, c�est �a, c�est ce dans quoi entre quand on pose Ies questions � un certain niveau qui est, celui-l� pr�cis�ment, d�termin� par le fait du langage, quand �a approche de sa fonction essentielle qui est de remplir tout ce que laisse de b�ant qu�il ne puisse y avoir de rapport sexuel, ce qui veut dire qu�aucun �crit ne puisse en rendre compte en quelque sorte d�une fa�on satisfaisante, qui soit �crit en tant que produit du langage. Parce que, bien entendu, depuis que nous avons vu les gam�tes, nous pouvons �crire au tableau : " homme = porteur de spermatozo�des ", ce qui serait une d�finition un peu drô1e parce qu�il n�y a pas que lui qui en porte, il y a des tas d�animaux ; de ces spermatozo�des-l�, des spermatozo�des d�hommes, alors, commen�ons � parler de biologie ! Pourquoi les spermatozo�des d�hommes sont-ils justement ceux que porte l�homme, parce que, comme c�est des spermatozo�des d�homme qui font l�homme, nous sommes dans un cercle qui tourne l� ! Mais qu�importe, on peut �crire �a.

    Seulement �a n�a aucun rapport avec quoi que ce soit qui puisse s��crire, si je puis dire, de sens�, c�est-�-dire qui ait un rapport au R�el. Ce n�est pas parce que c�est biologique que c�est plus r�el : c�est le fruit de la science qui s�appelle biologie. La R�el, c�est autre chose : le R�el, c�est ce qui commande toute la fonction de la signifiance. Le R�el, c�est ce que vous rencontrez justement de ne pouvoir, en math�matique, pas �crire n�importe quoi. Le R�el, c�est ce qui int�resse ceci que, dans ce qui est notre fonction la plus commune : vous baignez dans la signifiance, eh bien, vous ne pouvez les attraper tous en m�me temps, les signifiants, hein ! C�est interdit par leur structure m�me : quand vous en avez certains, un paquet, vous n�avez plus les autres, ils sont refoul�s. Ca ne veut pas dire que vous les dites pas quand m�me : justement, vous les dites " inter ". Ils sont interdits, �a ne vous emp�che pas de les dire, mais vous les dites censur�s. Ou bien tout ce qu�est la psychanalyse n�a aucun sens, est � foutre au panier, ou bien ce que je vous dis l� doit �tre votre v�rit� premi�re.

    Alors c�est �a dont il va s�agir cette ann�e, du fait qu�en se pla�ant � un certain niveau � Aristote ou pas, mais en tout cas le texte est l�, authentique �, quand on se place � un certain niveau, �a ne va pas tout seul. C�est passionnant de voir quelqu�un d�aussi aigu, d�aussi savant, d�aussi alerte, aussi lucide, se mettre � patauger l� de cette fa�on parce que quoi ? Parce qu�il s�interroge sur le principe. Naturellement il n�a pas la moindre id�e que le principe, c�est �a : c�est qu�il n�y a pas de rapport sexuel. Il n�en a pas id�e, mais on voit que c�est uniquement à ce niveau-l� qu�il se pose toutes les questions. Et alors ce qu�il 1ui sort comme vol d�oiseau à sortir du chapeau o� simplement il a mis une question dont il ne conna�t pas la nature, vous comprenez, c�est comme le prestidigitateur qui croit avoir mis ..., enfin, il faut bien qu�on l�introduise le lapin, (p21->) naturellement, qui doit sortir, et puis apr�s, il en sort un rhinoc�ros ! C�est tout � fait comme �a pour Aristote : car o� est le principe, si c�est le genre, mais alors si c�est le genre, il devient enrag� parce que : est-ce que c�est le genre g�n�ral ou le genre le plus sp�cifi�. Il est �vident que le plus g�n�ral est le plus essentiel, mais que tout de m�me le plus sp�cifi�, c�est bien ce qui donne ce qu�il y a d�unique en chacun. Alors, sans m�me se rendre compte � Dieu merci ! parce que gr�ce � �a il ne les confond pas � que cette histoire d�essentialit� et cette histoire d�unicit�, c�est la m�me chose ou plus exactement c�est homonyme � ce qu�il interroge, Dieu merci, il ne les confond pas, c�est pas de l� qu�il les fait sortir, il se dit : est-ce que le principe, c�est l�Un , ou bien est-ce que le principe, c�est l��tre. Alors � ce moment-l�, �a s�embrouille vachement ! Comme il faut � tout prix que l�Un soit et que l��tre soit un, l� nous perdons les p�dales. Car justement, le moyen de ne pas d�conner, c�est de les s�parer s�v�rement, c�est ce que nous essaierons de faire par la suite. Assez pour Aristote.

    Je vous ai annonc�, j�ai d�j� franchi le pas l�ann�e derni�re, que ce non-rapport, si je puis m�exprimer ainsi, il faut l��crire, il faut l��crire � tout prix, je veux dire �crire l�autre rapport, celui qui fait bouchon � la possibilit� d��crire celui-ci... Et d�j� l�ann�e derni�re, j�ai mis sur le tableau quelques choses dont apr�s tout je ne trouve pas mauvais de les poser d�abord. Naturellement, il y a l� quelque chose d�arbitraire. Je ne vais pas m�excuser en me mettant � l�abri des math�maticiens : les math�maticiens font ce qu�ils veulent et puis moi aussi. Tout de m�me, simplement pour ceux qui ont besoin de me donner des excuses, je peux faire remarquer que, dans les �l�ments de Bourbaki, on commence par foutre les lettres sans dire absolument rien de ce � quoi elles peuvent servir. Je parle... appelons �a symboles �crits, car �a ne ressemble m�me pas � aucune lettre, et ces symboles repr�sentent quelque chose qu�on peut appeler des op�rations, on ne dit absolument pas desquelles-il s�agit, �a ne sera que vingt pages plus loin qu�on commencera à pouvoir le d�duire r�troactivement d'apr�s la fa�on dont on s�en sert. Je n�irai pas du tout jusque-l�. J�essaierai tout de suite d�interroger ce que veulent dire les lettres que j�aurai �crites. Mais comme apr�s tout je pense que pour vous, �a serait beaucoup plus compliqu� que je les am�ne une par une � mesure qu�elles s�animeront, qu�elles prendront valeur de fonction, je pr�f�re poser ces lettres comme ce autour de quoi j�aurai � tourner ensuite.

    D�j� l�ann�e derni�re j�ai cru pouvoir poser ce dont il s�agit, 5.jpg et que je crois, pour des raisons qui sont des tentatives, pouvoir �crire comme en math�matiques, c�est � savoir la fonction qui se constitue de ce qu�il existe cette jouissance appel�e jouissance sexuelle et qui est proprement ce qui fait barrage au rapport. Que la jouissance sexuelle ouvre pour l��tre parlant la porte à la jouissance, et l� ayez un peu d�oreille : apercevez-vous que la jouissance, quand nous l�appelons comme �a tout court, c�est peut-�tre la jouissance pour certains, je ne l��limine pas, mais vraiment ce n�est pas la jouissance sexuelle.

    C�est le m�rite qu�on peut donner au texte de Sade que d�avoir appel� les choses par leur nom : jouir, c�est jouir d�un corps. Jouir, c�est (p22->) l�embrasser, c�est l��treindre, c�est le mettre en morceaux. En droit, avoir la jouissance de quelque chose, c�est justement �a : c�est pouvoir traiter quelque chose comme un corps, c�est-�-dire le d�molir, n�est-ce pas. C�est le mode de jouissance le plus r�gulier, c�est peut-�tre pour �a que ces �nonc�s ont toujours une r�sonance sadienne. Il ne faut pas confondre sadienne avec sadique, parce qu�on a dit tellement de conneries pr�cis�ment sur le sadisme que le terme est d�valoris� ! Je ne m�avance pas plus sur ce point.

    Ce que produit cette relation du signifiant à la jouissance, c�est ce que j�exprime par cette notion  !. Ce veut dire que x qui ne d�signe qu�un signifiant � un signifiant, �a peut �tre chacun de vous, chacun de vous pr�cis�ment au niveau, au niveau mince o� vous existez comme sexu�s. Il est tr�s mince en �paisseur, si je puis dire, mais il est beaucoup plus large en surface que chez les animaux, chez qui, quand ils ne sont pas en rut, vous ne les distinguez pas, ce que j�appelais, le dernier s�minaire, le petit gar�on et la petite fille : les lionceaux par exemple, ils se ressemblent tout � fait dans leur comportement. Pas vous, � cause que justement c�est comme signifiant que vous vous sexuez. Alors il ne s�agit pas l� de faire la distinction, de marquer le signifiant-homme comme distinct du signifiant-femme, d�appeler l�un X et l�autre Y, parce que c�est justement l� la question : c�est comment on se distingue. C�est pour �a que je mets ce x � la place du trou que je fais dans le signifiant, c�est-�-dire que je l�y mets, ce x, comme variable apparente, ce qui veut dire que chaque fois que je vais avoir � faire a ce signifiant sexuel, c�est-�-dire � ce quelque chose qui tient � la jouissance, je vais avoir � faire à !, et il y a certains, quelques-uns, sp�cifi�s parmi ces x qui sont tels qu�on peut �crire : pour tout x quel qu�il soit, ! , c�est-�-dire que fonctionne ce qui s�appelle en math�matiques une fonction X, c�est-�-dire que �a, �a peut s��crire :

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    Alors je vais vous dire tout de suite, je vais �clairer, enfin... �clairer... il y a que vous qui serez �clair�s, enfin vous serez �clair�s un petit moment ; comme disaient les sto�ciens, n�est-ce pas, quand il fait jour, il fait clair. Moi, je suis �videmment, comme je l�ai �crit au dos de mes �crits, du parti des lumi�res : j��claire... dans l�espoir du Jour " J ", bien s�r. Seulement, c�est justement lui qui est en question, le jour J, il n�est pas pour demain. Le premier pas � faire pour la philosophie des Lumi�res, c�est de savoir que le jour n�est pas lev� et que le jour dont il s�agit n�est que celui de quelque petite lumi�re dans un champ parfaitement obscur. Moyennant quoi vous allez croire qu�il fait clair quand je vous dirai que !, �a veut dire la fonction qui s�appelle la castration. Comme vous croyez savoir ce que c�est que la castration, alors je pense que vous �tes contents, au moins pour un moment ! Seulement figurez-vous que moi, si j��cris tout �a au tableau, et que je vais continuer, c�est parce que moi, je sais pas du tout ce que c�est que la castration ! Et que j�esp�re � l�aide de ce jeu de lettres venir � ce qu�enfin, justement, le jour se l�ve, � savoir qu�on sache que la castration, il faut bien en passer par l� et qu�il n�y aura pas de discours sain, � savoir qui ne laisse dans l�ombre la moiti� de son statut et de son conditionnement, tant qu�on ne le saura pas et on ne le saura qu�� avoir fait jouer � diff�rents niveaux de relations topologiques une certaine fa�on de changer les lettres et de voir comment (p23->) �a se r�partit. Jusque-l�, vous en �tes r�duits � de petites histoires, � savoir que Papa a dit : " on va te la couper " enfin, comme si c��tait pas la connerie type !

    Alors, il y a quelque part un endroit o� on ne peut faire que tout ce qui s�articule de signifiant tombe sous la coup de !, de cette fonction de castration. Ça a un petit avantage, de formuler les choses comme �a. Il peut vous venir � l�id�e justement que, si tout � l�heure, j�ai, non sans intention � je suis beaucoup plus rus� que j�en ai l�air � je vous ai amen� comme remarque sur le sujet de l�interdit, à savoir que tous les signifiants ne peuvent pas �tre l� tous ensemble, jamais, �a a peut �tre rapport, je n�ai pas dit : l�inconscient = la castration, j�ai dit : �a a beaucoup de rapports.

    �videmment, �crire comme �a !, c�est �crire une fonction d�une port�e, comme dirait Aristote, incroyablement g�n�rale. Que �a veuille dire que le rapport � un certain signifiant � vous voyez que... je ne l�ai pas encore dit, mais enfin disons-le � un signifiant qui est par exemple " un homme " � tout �a est tuant parce qu�il y a beaucoup � remuer, et puis personne ne l�ayant fait jamais avant moi, �a risque � tout instant de me d�gringoler sur la t�te � un homme �... J�ai pas dit 
� homme �. C�est assez rigolo tout de m�me que dans l�usage, comme �a, du signifiant, on dise au gars : sois un homme �, on ne lui dit pas " sois homme " non, on lui dit " sois un homme ", Pourquoi ? Ce qu�il y a de curieux, c�est que �a ne se dit pas beaucoup, � sois une femme �, mais on parle par contre de " la femme ", article d�fini. On a beaucoup sp�cul� sur l�article d�fini. Mais enfin, nous retrouverons �a quand il faudra. Ce que je veux simplement vous dire, c�est que ce qu��crit
!, �a veut dire, je ne dis m�me pas ces deux signifiants-l� pr�cis�ment, mais eux et un certain nombre d�autres qui s�articulent avec donc, ont pour effet qu�on ne peut plus disposer de l�ensemble des signifiants et que c�est peut-�tre bien l� une premi�re approche de ce qu�il en est de la castration, du point de vue, bien s�r, de cette fonction math�matique, que mon �crit imite. Dans un premier temps, je ne vous demande pas plus que de reconna�tre que c�est imit�. Ca ne veut pas dire que pour moi qui y ait d�j� r�fl�chi, �a n�aille pas beaucoup plus loin. Enfin, il y a moyen d��crire que pour tout x, �a fonctionne. C�est le propre d�une fa�on d��criture qui est issue du premier tra�age logicien dont Aristote est le responsable, ce qui lui a donn� ce prestige qui tient du fait que c�est formidablement jouissif, la logique, justement parce que �a tient � ce champ de la castration. Enfin, comment pourriez-vous justifier, � travers l�histoire, qu�une p�riode aussi ample comme temps, aussi br�lante comme intelligence, aussi foisonnante comme production, que notre Moyen Age, ait pu s�exciter � ce point sur ces affaires de la logique, et aristot�licienne. Pour que �a les ait mis dans cet �tat, car �a venait � soulever des foules, parce que, par l�interm�diaire des logiciens, �a avait des cons�quences th�ologiques o� la logique dominait beaucoup le th�o, ce qui n�est pas comme chez nous o� il n�y a plus que le th�o qui reste toujours l� bien solide, dans sa connerie, et o� la logique est l�g�rement �vapor�e, c�est bien que c�est jouissif, cette histoire. C�est d�ailleurs de là qu�est pris tout le prestige qui, de la construction d�Aristote, a retenti sur cette fameuse M�taphysique o� il d�bloque � plein tube. Mais � ce niveau-la, car je n�ai pas voulu aujourd�hui vous faire un cours d�histoire logique, si vous (p24->)  voulez aller chercher simplement les premiers Analytiques, ce qu�on appelle plus exactement les Analytiques Ant�rieurs, m�me pour ceux qui, bien entendu, les plus nombreux, n�ont jamais eu le courage de les lire, encore que ce soit fascinant, oui, je vous recommande quand m�me, � ce qu�on appelle le livre I, au chapitre 46, de lire ce qu�Aristote produit sur ce qu�il en est de la n�gation, a savoir sur la diff�rence qu�il y a � dire " l�homme n�est pas blanc ", si c�est bien �a le contraire de l�homme est blanc ou si, comme bien des gens le croyaient d�j� à son �poque � �a n�a pas arr�t� pour autant �, ou si le contraire, c�est de dire " l�homme est non-blanc ". Ce n�est absolument pas la m�me chose. Je pense que rien qu�� l��noncer comme �a, la diff�rence est sensible. Seulement, il est tr�s important que vous ayez pu lire ce chapitre, parce que, depuis que je vous ai racont� tellement de choses sur la logique des pr�dicats, au moins ceux ici qui d�j� se sont frott�s à des endroits o� on parle de ces trucs-l�, vous pourriez vous imaginer que le syllogisme est tout entier dans la logique des pr�dicats. C�est une petite indication que je fais lat�ralement. Comme j�ai pas voulu m�y attarder � peut-�tre que j�aurai le temps de le reprendre un jour � je veux simplement dire qu�il y a eu, pour que je puisse l��crire ainsi, au d�but du XIX si�cle, une mutation essentielle : c�est la tentative d�application de cette logique à ce dont d�j� tout � l�heure je vous ai indiqu� qu�il a un statut sp�cial, à savoir le signifiant math�matique.

    Ca a donn� ce mode d��criture dont, je pense, j�aurai le temps par la suite de vous faire sentir le relief et l�originalit�, � savoir que �a ne dit plus du tout la m�me chose que les propositions � car c�est de cela dont il s�agit � qui fonctionnent dans le syllogisme, � savoir que, comme je l�ai d�j� �crit l�ann�e derni�re :

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le signe de la n�gation mis au niveau o� il y a le Name.jpg  , c�est une possibilit� qui nous est ouverte, justement par cette introduction des quanteurs. Dans l�usage de ces quanteurs, appel�s g�n�ralement un quantificateur, mais que je pr�f�re appeler ainsi � je ne suis pas le seul, ni le premier, parce que la chose importante, c�est que vous sachiez, ce qui est �vident, que �a n'a absolument rien � faire avec la quantit� ; on l�appela comme �a parce qu�on n�a pas trouv� mieux, ce qui est un signe � enfin, cette articulation des quanteurs nous permet, ce qui n�a jamais �t� fait dans cette logique des quanteurs, et ce que je fais, parce que je consid�re que pour nous �a peut �tre tr�s fructueux, c�est la fonction du pas-tous �. Il y a un ensemble de ces signifiants qui suppl�e à la fonction du sexu�, qui y suppl�e pour ce qui est de la jouissance : il y a un endroit o� c�est " pas-tous " qui fonctionne dans la fonction de la castration. Je continue � me servir des quanteurs.

Il y a une fa�on qu�on a de les articuler, c�est d��crire :  

Name.jpg


File:4.jpg, �a veut dire " il existe ". Il existe quoi ? Un signifiant. Quand vous traitez de signifiants math�matiques, ceux qui ont un autre statut que vos petits signifiants sexu�s, qui ont un autre statut et qui mord autrement sur le R�el � J�essaierai peut-�tre quand m�me de faire pr�valoir dans votre esprit qu�il y a au moins une chose de r�elle, et c�est 1a seule dont nous sommes s�rs : c�est le nombre. Ce qu�on arrive � faire avec,
(p25->) on a fait pas mal ! Pour arriver jusqu�� construire les nombres r�els, c�est-�-dire justement ceux qui ne le sont pas, il faut que le nombre, ce soit quelque chose de r�el ! Enfin j�adresse �a en passant aux math�maticiens, qui vont peut-�tre me lancer des pommes cuites, mais qu�importe, ils le feront dans le priv�, puisqu�ici je les intimide. Revenons à ce que nous avons � dire. Il existe �, File:4.jpg, cette r�f�rence que je viens de faire n�est pas simplement une digression, c�est pour vous dire que � il existe � , c�est l� que �a a un sens. Ça a un sens pr�caire, c�est bien en tant que signifiant que vous existez, tous. Vous existez s�rement, mais �a ne va pas loin. Vous existez en tant que signifiant. Essayez bien de vous imaginer nettoy�s enfin de toute cette affaire, vous m�en direz des nouvelles ! Apr�s la guerre, on vous a incit�s � exister de fa�on fortement contemporaine, eh bien, regardez ce qu�il en reste ! Vous comprenez, j�oserais dire que les gens avaient tout de m�me un tout petit peu plus d�id�es dans la tête quand ils d�montraient l�existence de Dieu. C�est �vident que Dieu existe, mais pas plus que vous ! �a ne va pas loin. Mais enfin, ceci pour mettre au point ce qu�il en est de l�existence.

    Qu�est-ce qui peut bien nous int�resser, concernant ce qui existe en mati�re de signifiant ? �a serait qu�il en existe aumoinzun > pour qui �a ne fonctionne pas, cette affaire de castration. Et c�est bien pour �a qu�on l�a invent� : il s�appelle le p�re. C�est pourquoi le p�re existe, au moins autant que Dieu, c�est-�-dire pas beaucoup. Alors naturellement il y a quelques petits malins � je suis entour� de petits malins, ceux qui transforment ce que j�avance en pollution intellectuelle � , comme s�exprimait une de mes patientes et que !e remercie de m�avoir fourni �a ; elle a trouv� �a toute seule, parce que c�est une sensible ; d�ailleurs, en g�n�ral, il n�y a que les femmes qui comprennent ce que je dis � alors il y en a qui ont d�couvert que je disais que le p�re, c�est peut-�tre un mythe, parce qu�il saute aux yeux en effet que ! ne marche pas au niveau du mythe d�OEdipe : le p�re, il n�est pas ch�tr�, sans �a comment pourrait-il les avoir toutes ! Elles n�existent m�me que l� en tant que toutes... Car c�est aux femmes que �a  convient le " pas-tous ", mais enfin, je commenterai �a plus loin la prochaine fois.

    Donc a partir de ce qu� " il existe un ", c�est � partir de l� que tous les autres peuvent fonctionner, c�est en r�f�rence � cette exception, � cet " il existe ". Seulement voil�, � tr�s bien comprendre qu�on peut �crire le rejet de la fonction : ! ni�, " il n�est pas vrai " que �a se castre, �a c�est le mythe. Seulement, ce dont ils ne se sont pas aper�us, les petits malins, c�est que c�est corr�latif de l�existence et que �a pose le " il existe " de cet � il n�est pas vrai � de la castration.

    Il est 2 heures, alors je vais vous marquer la quatri�me fa�on de faire usage de ce qu�il en est de la n�gation, quand vous vous fondez sur les quanteurs, qui est d��crire " il n�en existe pas ", File:4.jpg.  " Il n�en existe pas " qui quoi ?... pour quoi il ne soit pas vrai que la fonction 5.jpg soit ce qui domine ce qu�il en est de l�usage du signifiant. Mais est-ce que c�est ce!a que �a veut dire ? Car tout � l�heure l�existence, je vous l�ai distingu�e de l�exception, et si la n�gation, l�, voulait dire : 6.jpg sans exception de cette position signifiante, elle peut s�inscrire dans la (p26->) n�gation de la castration, dans le rejet, dans le " il n�est pas vrai que la castration domine tout ". C�est sur cette petite �nigme que je vous laisserai aujourd�hui, parce qu�� la v�rit� c�est tr�s �clairant sur le sujet de savoir que la n�gation, ce n�est pas une chose dont on peut user comme �a d�une fa�on aussi simplement univoque qu�on le fait dans la logique des propositions, o� tout ce qui n�est pas vrai est faux, et o� � autre chose �norme ! � tout ce qui n�est pas faux devient vrai ! ... Bon, je laisse les choses au moment o� c�est l�heure qui me pousse, comme il convient, et je reprendrai les choses le deuxi�me mercredi de janvier au point pr�cis o� je les ai laiss�es aujourd�hui.

note: bien que relu, si vous d�couvrez des erreurs manifestes dans ce s�minaire, ou si vous souhaitez une pr�cision sur le texte, je vous remercie par avance de m'adresser un email. [#J.LACAN Haut de Page]
[../../erreurs.htm commentaires sur le mise au net des S�minaires ]relu ce 13 juillet 2005