Text/Jacques Lacan/OP17051972.htm

From No Subject - Encyclopedia of Psychoanalysis
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J.LACAN                               gaogoa

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XIX- ...Ou Pire    1971-1972
      
                                                 [#note note]

17 Mai 1972

[1]

(p107->) Voilà, ça tourne autour de ce que l'analyse nous conduit à formuler, cette fonction File:107-1.jpg, de ce par rapport à quoi il s'agit de savoir s'il existe, s'il existe un x qui satisfasse à la fonction . Alors, naturellement, ça suppose d'articuler ce que ça peut être que l'existence. Il est à peu près certain que, historiquement, ça n'a surgi cette, cette notion de l'existence, qu'avec l'intrusion du réel, du réel mathématique comme tel. Mais c'est une preuve de rien parce que, nous sommes pas ici pour faire l'histoire de la pensée, il ne peut y voir aucune histoire de la pensée, la pensée est une fuite en elle-même. Elle projette sous le nom de mémoire, n'est-ce pas, la méconnaissance de sa moire. Tout ça n'empêche pas que nous pouvons essayer de faire certain repérage et, pour partir de ce qui n'est pas par hasard que j'ai écrit en forme de fonctions, j'ai commencé d'énoncer quelque chose qui, j'espère, vous rendra service, un dire que, si je l'écris, c'est dans un sens, dans le sens que c'est une fonction sans rapport avec quoi que ce soit qui fonde d'eux - d, apostrophe, e. u. x. -, UN. Alors, vous voyez que toute l'astuce est sur le subjonctif qui appartient à la fois au verbe fonder et au verbe fondre. D'eux n'est pas fondu en UN, ni UN fondé par DEUX. Voilà c'est ce que dit Aristophane dans une très jolie petite fabulette du " Banquet " : qu'ils ont été séparés en deux. Ils étaient d'abord en forme de bête à deux dos ou de bête à dos d'eux .... ce qui, bien sûr, si la fable songeait le moins du monde à être un instant autre chose qu'une fable, c'est-à-dire à être consistante, n'impliquerait nullement qu'ils ne refassent pas des petits à deux dos, à dos d'eux, ce dont personne ne fait la remarque et heureusement, parce qu'un mythe est un mythe et celui-là en dit assez : c'est celui que j'ai d'abord projeté sous une forme plus moderne, sous la forme de File:107-1.jpg.

    C'est en somme ce qui, concernant les rapports sexuels, se présente à nous comme l'espèce de discours - je parle de la fonction mathématique - l'espèce de discours - enfin tout au moins je vous le propose comme modèle - qui, sur ce point nous permettrait de fonder autre chose du semblant... ou pire.

     Ce matin, moi, j'ai commencé dans le pire et malgré tout, je trouve pas superflu de vous en faire part, ne serait-ce que pour voir où ça peut aller. C'était à propos de cette petite coupure du courant. Je ne sais pas jusqu'où vous l'avez eue, mais moi, je l'ai eue jusqu'à dix heures ? Ca m'a énormément emmerdé parce que c'est l'heure où d'habitude je rassemble, ou je repense à ces petites notes. Ça ne me le facilitait pas. En plus, à cause de la même coupure, on m'a cassé un verre à dents auquel je tenais beaucoup. S'il y a des gens qui m'aiment ici, ils peuvent peut-être m'en payer un autre, j'en aurai comme ça peut-être plusieurs, ce qui me permettra de les casser tous, sauf celui que je préférerai ! J'ai une petite cour qui est faite exprès pour ça. Bon, et alors, je me disais, en pensant enfin que bien sûr cette coupure, ça ne nous venait pas de personne, ça nous venait d'une décision des travailleurs . Moi, j'ai un respect que l'on ne peut même pas imaginer pour la gentillesse de cette chose qui s'appelle une coupure, une grève. Quelle délicatesse de s'en tenir là ! Mais là il me semblait que vu l'heure. Quoi ? On (p108->) n'entend pas ? J'étais en train de dire qu'une grève, c'était la chose du monde la plus sociale qui soit, qui représente un respect du lien social qui est quelque chose de fabuleux. Mais là il y avait une pointe dans cette coupure de courant qui avait une signification d'une grève, c'est que c'était justement l'heure où tout comme à moi qui préparait ma cuisine comme ça pour vous parler maintenant, qu'est-ce que ça devait pouvoir enquiquiner celle qui, malgré tout étant à l'occasion la femme du travailleur, qui - quand même j'en fréquente ! - s'appelle la bourgeoise.

    C'est vrai qu'ils les appellent comme ça. Et alors je me mettais quand même à rêver. Parce que tout ça se tient : Ce sont des travailleurs, c'est-à-dire des exploités, c'est tout de même bien parce qu'ils préfèrent encore ça à l'exploitation sexuelle de la bourgeoise ! Voilà ça, c'est pire, c'est le ... ou pire, vous comprenez ! Parce que à quoi ça mène de prononcer des articulations sur des choses à quoi on ne peut rien ? Le rapport sexuel ne se présente, on ne peut pas dire que sous la forme de l'exploitation, c'est d'avant, c'est à cause de cette exploitation que ça s'organise parce que, il n'y a même pas cette exploitation-là. Voilà, ça, c'est le... ou pire. C'est pas sérieux. C'est pas sérieux quoiqu'on voit bien que c'est là que devrait aller un discours qui ne serait pas du semblant, mais c'est un discours qui finirait mal qui ne serait pas du tout un lien social comme c'est ce qu'il faut que soit un discours.

    Bon alors, il s'agit maintenant du discours psychanalytique et il s'agit de faire que celui qui y fait fonction de petit a tienne une position - je vous ai déjà expliqué ça, la dernière fois, bien sûr, naturellement ça vous est passé comme l'eau sur les plumes d'un canard, mais enfin certains quand même en ont paru un peu comme ça, mouillés - tienne la position du semblant. Ceux qui sont vraiment intéressés là-dedans, j'en ai eu quand même des échos, ça les a émus. Il y a certains psychanalystes qui ont quelque chose qui les tourmente, qui les angoisse de temps en temps. C'est pas pour ça que je dis ça, que j'insiste sur le fait que le a doive tenir la position du semblant, c'est pas pour leur foutre de l'angoisse, je préférerais même qu'ils n'en aient pas. Enfin, c'est pas un mauvais signe que ça le leur donne parce que ça veut dire que mon discours n'est pas complètement superflu, qu'il peut prendre un sens. Mais ça ne suffit pas. Ca n'assure absolument rien qu'un discours ait un sens, parce qu' il faut au moins que ce sens, on puisse le repérer. Si vous faites ça, enfin, le mouvement brownien, à chaque instant, ça a un sens. C'est bien ce qui rend la position du psychanalyste difficile, parce que l'objet a , sa fonction, c'est le déplacement et comme c'est à propos du psychanalyste que j'ai fait descendre du ciel , pour la première fois, l'objet a, j'ai commencé dans un petit graphe qui était fait pour donner os ou repère, aux formations de l'inconscient, à le cerner dans des points où il ne pouvait pas bouger. Dans la position du semblant, c'est beaucoup moins facile d'y rester parce que l'objet a , il nous fout le camp en moins de deux entre les pattes puisque c'est - comme je l'ai déjà expliqué quand j'ai commencé à en parler à propos du langage - c'est " il court, il court, le furet " : dans tout ce que vous dites, il est à chaque instant ailleurs.

    Alors, c'est pour ça que nous essayons d'appréhender d'où pourrait se situer quelque chose qui serait au-delà du sens, de ce sens qui fait qu'aussi bien je ne peux pas obtenir d'autre effet que l'angoisse là où c'est (p109->) pas du tout ma visée. C'est en ça que nous intéresse que soit ancré ce réel, ce réel que je dis, pas pour rien, être mathématique parce que, somme toute à l'expérience, à l'expérience de ce qu'il s'agite, de ce qui se formule, de ce qui s'écrit à l'occasion, nous voyons, nous pouvons toucher du doigt que là il y a quelque chose qui résiste, je veux dire dont on ne peut pas dire n'importe quoi. On peut pas donner au réel mathématique n'importe quel sens. Il est même tout à fait frappant que ceux qui se sont, en somme, dans une époque récente, approchés de ce réel avec l'idée préconçue de lui faire rendre compte de son sens à partir du vrai . Il y avait comme ça un immense farfelu que vous connaissez bien sûr, de réputation, parce qu'il a fait son petit bruit dans le monde, qui s'appelait Bertrand Russell : il est au cœur de cette aventure . C'est quand même lui qui a formulé quelque chose comme ceci enfin, que la mathématique, c'est quelque chose qui s'articule d'une façon telle que, qu' on ne sait même pas si c'est vrai, ce qui s'articule ou si ça a un sens. Ça n'empêche pas que justement ça prouve ceci : c'est qu'on ne peut lui en donner n'importe lequel, ni dans l'ordre de la vérité, ni dans l'ordre du sens et que ça résiste au point que pour aboutir à ce résultat que moi, je considère comme un succès, le succès même, le mode sous lequel ça s'impose que c'est réel, c'est que justement, ni le vrai, ni le sens n'y dominent, ils sont secondaires et que de là, la position, cette position seconde à ces deux machins qui s'appellent le vrai et le sens, leur restait inhabituelle, à eux, enfin que ça donne un peu le tournis aux gens quand ils prennent la peine de penser. C'était le cas de Bertrand Russell : il pensait, c'était... c'est une manie d'aristocrate ! Il n'y a vraiment aucune raison de trouver que ce soit là une fonction essentielle. Mais ceux qui édifient - je suis pas en train de faire de l'ironie - la Théorie des Ensembles, ont bien assez à faire dans ce réel pour trouver le temps de penser à côté. La façon dont on s'est engagé dans une voie, non seulement dont on ne peut pas en sortir, mais dont ça mène quelque part avec une nécessité, et puis en plus une fécondité, fait qu'on touche qu'on a affaire à tout autre chose que ce qui est pourtant employé, ce qui a été la démarche dans l'initium de cette théorie : c'était d'interroger tout ce qu'il en était de ce réel, car c'est de là qu'on est parti parce qu'on ne pourait pas ne pas voir que le nombre c'était réel et que depuis quelque temps il y avait du rififi avec l'Un. C'était pas quand même une mince affaire de s'apercevoir que le nombre réel, on pouvait mettre en question si ça avait à faire quelque chose avec l'Un, l'Un comme ça, le premier des nombres entiers, des nombres dits naturels. C'est que, on avait eu le temps, depuis le XVIIe siècle, jusqu'au début du XIXe siècle, d'approcher le nombre un tout petit peu autrement que les Anciens ne l'avaient fait.

   Si je pars de ça, c'est bien parce que c'est ça l'essentiel. Non seulement " y a d'lUn ", mais ça se voit à ça que l'Un, lui, il ne pense pas, " il pense pas donc je suis " en particulier. Quand je dis " Il pense pas donc je suis ", j'espère que vous vous souvenez que même Descartes, c'est pas ce qu'il dit. Il dit ça se pense, " donc je suis " . L'Un, ça ne se pense pas, même tout seul. Mais ça dit quelque chose. C'est même ça qui le distingue et il n'a pas attendu que des gens se posent à son propos, à propos de ses rapports, la question de ce que ça veut dire du point de vue de la vérité, il n'a pas attendu même la logique. Car, c'est ça, la logique. La logique, c'est de repérer dans la grammaire ce qui prend forme de la position de vérité, ce qui dans le langage le rend adéquat à (p110->) faire vérité ; adéquat, ça veut pas dire qu'il réussira toujours, alors à bien rechercher ses formes, on croit approcher ce qu'il en est de la vérité. Mais avant qu'Aristote ne s'avise de ça, à savoir du rapport à la grammaire, l'UN avait déjà parlé, et pas pour rien dire : il dit ce qu'il a à dire dans le Parménide. C'est l'Un qui se dit. Il se dit, il faut bien le dire, en visant à être vrai, d'où naturellement l'affolement qui en résulte : il n'y a personne, parmi les personnes qui font la cuisine du savoir, qui ne se sente pas à chaque fois en prendre un bon coup. Ça casse le verre à dents ! C'est bien pour ça qu'après tout, encore que certains aient mis une certaine bonne volonté, un certain courage à dire, qu'après tout ça peut s'admettre, quoique ce soit un peu tiré par les cheveux, on n'en est pas encore venu à bout de cette chose qui était pourtant simple : de s'apercevoir que l'Un , quand il est véridique, quand il dit ce qu'il a à dire, on voit où ça va : en tout cas à la totale récusation d'aucun rapport à l'être.

    Enfin il n'y a qu'une chose qui en ressorte quand il s'articule, c'est très exactement ceci : " y en a pas deux " . Je vous l'ai dit : c'est un dire. Et même, vous pouvez y trouver à la portée de la main la confirmation de ce que, moi je dis quand je dis que la vérité ne peut que se mi-dire parce que vous n'avez qu'à casser la formule : pour dire ça, il ne peut que dire, ou bien " il y en a " -- comme je le dis " y a d'l'UN " -- ou bien " pas deux ", ce qui s'interprète tout de suite pour nous : " il n'y a pas de rapport sexuel ". C'est donc déjà, vous voulez bien, à la portée de notre main, mais, bien sûr, pas à la portée de la main unienne de l'UN, d'en faire quelque chose dans le sens du sens. C'est bien pour ça que je recommande à ceux qui veulent tenir la position de l'analyste, avec ce que ça comporte de savoir ne pas en glisser, de se mettre à la page de ce qui, bien sûr, pourrait pour eux se lire, à seulement travailler le Parménide. Mais ça serait quand même un peu court. On se casse les dents là-dessus. Au lieu qu'il est arrivé autre chose qui rend tout à fait clair, si, bien sûr, on s'obstine un peu, si on s'y rompt, si on s'y brise même, qui rend tout à fait claire la distinction qu'il y a d'un Réel qui est le réel mathématique avec quoi que ce soit de ces badinages qui partent de ce je ne sais quoi qui est notre position nauséeuse qui s'appelle le vrai ou le sens. Bien sûr, naturellement, ça veut pas dire que ça n'aura pas d'effet, d'effet de massage, d'effet de revigoration, d'effet de soufflage, de nettoiement sur ce qui nous paraîtra exigible au regard du vrai ou bien du sens. Mais justement, c'est bien ce que j'en attends : c'est qu'à se former à distinguer ce qu'il en est de l'UN simplement, à s'approcher de ce réel dont il s'agit en ce qu'il supporte le nombre, déjà ça permettra beaucoup à l'analyste -- je veux dire qu'il peut lui venir, dans ce biais où il s'agit d'interpréter, de rénover le sens, de dire des choses, de ce fait, un peu moins court-circuitées, un peu moins chatoiement que toutes les conneries qui peuvent nous venir et dont tout à l'heure " . . . ou pire ", je vous ai donné l'échantillon, à partir simplement de ce qui pour moi n'était que la contrariété du matin. J'aurais pu broder, comme ça, sur le travailleur et sa bourgeoise et en tirer une mythologie. Ça vous a fait rire d'ailleurs, parce que, dans ce genre enfin, le champ est vaste, le sens et le vrai, ça ne manque pas. C'est même devenu la mangeoire universitaire justement. C'est qu'il y en a tellement, il y en a un tel éventail qu'il s'en trouvera bien un jour pour faire avec ce que je vous dis une ontologie, pour dire que j'ai dit que la parole, c'était l'effet, le comble-(p111->) ment de cette béance qui est ce que j'articule " il n'y a pas de rapport sexuel ". Ça va tout seul comme ça, oui ! C'est l'nterprétation subjectiviste, c'est parce qu'il ne peut pas la chatouiller qu'il lui fait du baratin ! C'est simple ! Moi ce que j'essaye, c'est autre chose : c'est de faire que dans votre discours, vous mettiez moins de conneries, je parle des analystes. Pour ça, que vous essayiez, comme ça, d'aérer un peu le sens avec des éléments qui seraient un peu nouveaux. Alors c'est pourtant pas une exigence qui ne s'impose pas parce qu'il est bien clair qu'il n'y a aucun moyen de répartir deux séries quelconques - quelconques, je dis - d'attributs qui fassent une série " mâle ", d'un côté, et, de l'autre, côté, la série " femme ". J'ai d'abord pas dit " homme " pour ne pas faire de confusion.

    Est-ce que je vais broder là-dessus encore pour rester dans... dans le pire ? Évidemment, c'est tentant, même pour moi, moi, je m'amuse ! Et puis, je suis sûr de vous amuser, de vous montrer que ce qu'on appelle l'actif, si c'est là-dessus que vous vous fondez, parce que naturellement c'est la monnaie courante, que c'est ça alors ... il est actif, le cher mignon ! Dans le rapport sexuel, il me semble que, c'est plutôt la femme qui, elle, en met un coup ! Et puis il y a qu'à le voir quand même dans des positions que, nous n'appellerons nullement primitives, parce que c'est pas parce qu'on en rencontre dans le tiers monde qui est le monde de Monsieur Thiers que, oui... que c'est évident que dans le vie normale -- je ne parle pas, bien sûr, naturellement des types du Gaz et de l'Électricité de France qui, eux, ont pris leurs distances, qui se sont voués au travail -- mais dans une vie, appelons-la simplement ce qu'elle est, ce qu'elle est partout, depuis qu'il y a eu notre grande subversion , notre grande subversion chrétienne, eh bien, l'homme, il se les roule, la femme, elle moud, elle broie, elle coud, elle fait les courses et elle trouve le moyen encore, dans ces solides civilisations qui ne sont pas perdues, elle trouve encore le moyen de tortiller du derrière après, pour -- je parle d'une danse -- pour la satisfaction jubilatoire du type qui est là ! Alors pour ce qu'il est de l'actif et du passif permettez-moi de ! ! ! C'est vrai qu'il chasse ! Il y a pas de quoi rigoler, mon petit ! C'est très important .

    Puisque vous me provoquez alors, je continuerai à m'amuser. C'est malheureux parce que je n'arriverai pas au bout de ce que j'ai à vous dire aujourd'hui concernant l'UN... il est deux heures ! Mais quand même puisque ça fait rigoler, la chasse, oui ... je ne sais pas ... je sais pas si tout de même, malgré tout, c'est pas absolument superflu d'y voir justement une vertu de l'homme, la vertu justement par laquelle il se montre ce qu'il a de mieux : être passif. Parce que, d'après tout ce qu'on sait, quand même, ... je ne sais pas si vous vous rendez bien compte, parce que, bien sûr, vous êtes tous ici des Jean-foutre, et s'il n'y a pas ici de paysans, personne ne chasse, mais s'il y a aussi ici des paysans, ils chassent mal, pour le paysan . C'est pas forcément un homme, le paysan, quoiqu'on en dise . Pour le paysan, le gibier, ça se rabat, alors pan ! pan ! on lui ramène tout ça. C'est pas ça du tout, la chasse . La chasse, quand elle existe, il n'y a qu'à voir dans quelles transes, ça les mettait ; ça, parce qu'on le sait, on en a eu des petites traces de tout ce qu'ils offraient de propitiatoire à la chose qui pourtant n'était plus là , vous comprenez ils n'étaient quand même pas plus dingues que nous : une bête tuée est une bête tuée. Seulement s'ils avaient pu tuer la bête, c'est parce qu'ils (p112->) s'étaient si bien soumis à tout ce qui est de sa démarche, de sa trace, de ses limites, de son territoire, de ses préoccupations sexuelles, pour s'être justement, eux, substitués à ce qui n'est pas tout ça : à la non-défense, à la non clôture, aux non-limites de la bête, à la vie pour dire le mot et que, quand cette vie ils avaient dû la soustraire après y être devenus tellement, eux, cette vie même, que ça se comprend, bien sûr, qu'ils aient trouvé, non seulement que ça faisait moche, mais que c'était dangereux, que ça pouvait bien, à eux, leur arriver aussi.

    Ça doit être de ces choses qui ont même fait penser quelques-uns, parce que ces choses-là quand même, ça continue à se sentir ... et j'ai entendu ça, moi, formulé d'une façon curieuse par quelqu'un d'excessivement intelligent, un mathématicien que, - mais alors là il extrapole, le gars quand même, mais enfin je vous le fournis parce que parce que c'est excitant - que le système nerveux, dans un organisme, c'était peut-être bien pas autre chose que ce qui résulte d'une identification à la proie . Je vous lâche l'idée comme ça, je vous la donne, vous en ferez ce que vous voudrez, bien sûr, mais on peut déconner là-dessus une nouvelle théorie de l'évolution qui sera un tout petit peu plus drôle que les précédentes. Je vous la donne d'autant plus volontiers qu'elle est pas à moi. Moi aussi on me l'a refilée ! Mais je suis sûr que ça excitera les cervelles ontologiques. C'est vrai, bien sûr aussi pour le pêcheur et enfin dans tout ce par quoi l'homme est femme parce que la façon dont un pêcheur passe la main sous le ventre de la truite qui est sous son rocher ... enfin il faut qu'il y ait ici un pêcheur de truites, quand même il y a des chances, il doit savoir ce que je dis là, enfin c'est quelque chose ! Enfin tout ça ne nous met pas sur le sujet de l'actif et du passif, dans une répartition bien claire.

    Alors je ne vais pas m'étendre parce qu'il suffit que je confronte chacun des couples habituels avec un essai de répartition bisexuelle quelconque pour arriver à des résultats aussi bouffons. Alors qu'est-ce que ça pourrait bien être ? Quand je dis " Y a d'l'UN " -- il faut quand même que je balaye devant le pas de ma porte et puis je vois pas pourquoi j'en resterai là puisque je vous parlerai donc le jeudi 1er juin, je crois quelque chose comme ça, vous vous rendez compte, le 1er jeudi de juin je suis forcé de revenir des quelques jours de vacances pour ne pas manquer à Sainte Anne !
-- alors je vais quand même là faire la remarque que " Y a de l'UN ", ça veut pas dire -- il me semble que, quand même pour beaucoup, ça doit être déjà sûr, mais pourquoi pas enfin -- ça veut pas dire qu'il y a de l'individu. C'est bien pour ça, vous comprenez, que je vous demande d'enraciner cet " Y a d'lUN " de là où il vient, c'est-à-dire qu'il n'y a pas d'autre existence de l'UN que l'existence mathématique. Il y a Un quelque chose, UN argument qui satisfait à UNE formule. Et un argument, c'est quelque chose de complètement vidé de sens. C'est simplement l'UN comme UN. C'est ça que j'avais au départ l'intention de vous bien marquer dans la Théorie des Ensembles. Je vais peut-être quand même pouvoir vous l'indiquer, tout au moins avant de vous quitter. Mis il faut liquider aussi ceci d'abord que même pas l'idée de l'individu, ça ne constitue en aucun cas l'UN. Parce que on voit bien quand même que ça pourrait être à la portée, pour ce qui est du rapport sexuel sur lequel en somme pas mal de gens s'imaginent que ça se fonde : il y a autant d'individus d'un côté que de l'autre, (p113->) en principe, au moins chez l'être qui parle : le nombre des hommes et des femmes sauf exception -- je veux dire comme ça des petites exceptions : dans les îles britanniques, il y a peut-être un peu moins d'hommes que de femmes ... ailleurs il y a eu les grands massacres naturellement des hommes, mais enfin ça n'empêche pas que chacune a eu son chacun. Ça ne suffit pas du tout à motiver le rapport sexuel, qu'ils aillent UN par UN. C'est quand même drôle que vous l'ayez vu : il y a là une espèce d'impureté, dans la Théorie des Ensembles, autour de cette idée de la correspondance bi-univoque . On voit bien en quoi là l'ensemble se rattache à la classe et que la classe, comme tout ce qui s'épingle d'un attribut, c'est quelque chose qui a affaire avec le rapport sexuel. Seulement c'est justement ça, c'est justement ça que je vous demande de vouloir appréhender grâce à la fonction de l'ensemble : c'est qu'il y a un UN distinct de ce qui unifie comme attribut une classe. Il y a une transition par l'intermédiaire de cette correspondance bi-univoque : il y en a autant d'un côté que de l'autre. Et certains fondent là-dessus l'idée de la monogamie. On se demande en quoi c'est soutenable, mais enfin c'est dans l'Évangile. Comme il y en a autant, jusqu'au moment où il y aura une catastrophe sociale... c'est arrivé, parait-il, au beau milieu du Moyen-Age, en Allemagne, on a pu statuer, parait-il, à ce moment-là que le rapport sexuel pouvait être autre chose que bi-univoque. Mais ce qui est assez amusant, c'est que ceci, c'est que la SEX-RATIO, il y a des gens qui se sont posés le problème en tant que tel : y a-t-il autant de mâles que de femelles . Et il y a eu une littérature là-dessus qui est vraiment très piquante, très amusante, parce que ce problème est en somme un problème qui est résolu le plus fréquemment par ce que nous appellerons la sélection chromosomique ... le cas le plus fréquent, c'est évidemment une répartition des deux sexes en une quantité d'individus reproduits égaux dans chaque sexe, égaux en nombre. C'est vraiment très joli qu'on se soit posé la question de ce qui arrive, si un déséquilibre commence à se produire. On peut très facilement démontrer que, dans certains cas de ce déséquilibre, ça ne peut aller qu'en s'accroissant, ce déséquilibre, si on s'en tient à la sélection chromosomique, que nous n'appellerons pas de hasard puisqu'il s'agit d'une répartition. Mais alors la solution élégante qu'on lui a donné, c'est que, dans ce cas, ça devrait être compensé par la sélection naturelle. La sélection naturelle, on la voit là se montrer à nu, je veux dire que ça se résume à dire ceci : que les plus forts sont forcément les moins nombreux et, comme ils sont les plus forts, ils prospèrent et que donc ils vont rejoindre les autres en nombre. La connexion de cette idée de la sélection naturelle avec justement le rapport sexuel est un des cas où se montre bien que ce qu'on risque à tout abord du rapport sexuel, c'est de rester dans le mot d'esprit. Et en effet tout ce qui s'en est dit est de cet ordre.

    S'il est important qu'on puisse articuler autre chose que quelque chose qui fasse rire, c'est bien justement ce que nous cherchons pour assurer la position de l'analyste d'autre chose que de ce qu'elle paraît être dans beaucoup de cas : un gag. Le départ se lit en ceci, dans la Théorie des Ensembles, qu'il y a fonction d'élément : être un élément dans un ensemble, c'est être quelque chose qui n'a rien à faire à appartenir à un registre qualifiable d'Universel, c'est-à-dire à quelque chose qui tombe sous le coup de l'attribut. C'est la tentative de la Théorie des Ensembles de dissocier, de désarticuler de façon définitive le prédicat de l'attribut. (p114->) Ce qui, jusqu'à cette théorie, caractérise la notion justement en cause dans ce qu'il en est du type sexuel pour autant qu'il amorcerait quelque chose d'un rapport, c'est très précisément ceci que l'Universel se fonde sur un commun attribut. Il y a là en outre l'amorce de la distinction logique de l'attribut au sujet. Et le sujet de là se fonde : c'est à quoi quelque chose, qui s'y distingue, peut être appelé attribut.

    De cette distinction de l'attribut, ce qui en résulte c'est tout naturellement ceci qu'on ne met pas dans un même ensemble les torchons et les serviettes par exemple. A l'opposé de cette catégorie qui s'appelle la classe, il y a celle de l'ensemble dans laquelle, non seulement le torchon et la serviette sont compatibles, mais qu'il ne peut, dans un ensemble comme tel de chacune de ces deux espèces, n'y avoir qu'UN. Dans un ensemble, il ne peut y avoir, si rien ne distingue un torchon d'un autre, il ne peut y avoir qu'un torchon, de même qu'il ne peut y avoir qu'une serviette. L'UN, en tant que différence pure, est ce qui distingue la notion de l'élément. L'UN en tant qu'attribut en est donc distinct. La différence entre l'UN de différence et l'UN attribut est celle-ci : c'est que quand vous vous servez pour définir une classe d'un énoncé attributif quelconque, l'attribut ne viendra pas, dans cette définition en surnombre, c'est-à-dire que si vous dites " l'homme est bon ", et, si, à ce propos, ce qui peut se dire, car qui n'est obligé de le dire : poser que " l'homme est bon " n'exclut pas qu'on ait à rendre compte de ce qu'il ne réponde pas toujours à cette appellation. On trouve d'ailleurs toujours suffisamment de raisons pour montrer qu'à cet attribut il est capable de ne pas répondre, d'éprouver une défaillance à le remplir. C'est la théorie qu'on fait et où on se livre, -- on a tout le sens à sa disposition pour y faire face, à expliquer que de temps en temps quand même il est mauvais, mais ça change rien à son attribut -- que si on en venait alors à devoir faire la balance du point de vue du nombre : combien y en a, qui y est-ce qui y tiennent et combien y en a qui n'y répondent pas, l'attribut " bon " ne viendrait pas dans la balance en plus, en plus de chacun des hommes bons. C'est très précisément la différence avec le UN de différence : c'est que quand il s'agit d'articuler sa conséquence, ce UN de différence a comme tel à être compté dans ce qui s'énonce de ce qu'il fonde qui est ensemble et qui a des parties. Le UN de différence, non seulement est comptable, mais doit être compté dans les parties de l'ensemble.

    J'arrive à l'heure Deux précisément. Je ne peux donc que vous indiquer ce qui sera la suite de ce dans quoi comme d'habitude je suis amené à couper, c'est-à-dire très souvent à peu près n'importe comment et aujourd'hui sans doute en raison justement d'une autre coupure qui est celle de mon courant de ce matin avec ses conséquences, je suis donc amené à ne pouvoir ne vous donner que l'indication de ce qui, sur cette affirmation, affirmation-pivot, sera ma reprise, c'est ceci : le rapport de cet UN qui a à se compter en plus avec ce qui, dans ce que j'énonce comme, non pas suppléant, mais ne se déployant en un lieu d'à la place du rapport sexuel, se spécifie de " il existe " non pas File:107-1.jpg, mais le dire que ce File:107-1.jpg n'est pas la vérité, que c'est de là que surgit l'UN qui fait que cet File:114-1.jpg doit être mis -- et c'est le seul élément caractéristique -- doit être mis du côté de ce qui fonde l'homme comme tel.

(p115->) Est-ce à dire que ce fondement le spécifie sexuellement, c'est très précisément ce qui sera dans la suite à mettre en cause. Car bien entendu, il n'en reste pas moins que la relation File:115-1.jpg est ce qui définit l'homme là attributivement comme " tout homme ". Qu'est-ce que c'est que ce " tout " ou ce " tous " , qu'est-ce que c'est que " tous les hommes " en tant qu'ils fondent un côté de cette articulation de suppléance, c'est où nous reprendrons à nous revoir la prochaine fois que je vous rencontrerai. La question " Tous " qu'est-ce qu'un " Tous " est entièrement à reposer à partir de la fonction qui s'articule " Y a d'l'UN " .

note: bien que relu, si vous d�couvrez des erreurs manifestes dans ce s�minaire, ou si vous souhaitez une pr�cision sur le texte, je vous remercie par avance de m'adresser un email. [#J.LACAN Haut de Page]
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relu ce 20 juillet 2005