Difference between revisions of "Maurice Merleau-Ponty par Jacques Lacan"
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− | <ul><font face="Arial,Helvetica"><font size="+2">par Jacques Lacan</font></font> | + | <ul><font face="Arial,Helvetica"><font size="+2">par Jacques [[Lacan]]</font></font> |
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− | <ul><font face="Arial,Helvetica"><font size="+2">Les Temps modernes, 1961<a></a></font></font></ul> | + | <ul><font face="Arial,Helvetica"><font size="+2">Les [[Temps]] modernes, 1961<a></a></font></font></ul> |
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<ul><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">1. On peut exhaler le cri | <ul><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">1. On peut exhaler le cri | ||
− | qui nie que l'amitié puisse cesser de vivre. On ne peut dire la | + | qui nie que l'amitié puisse cesser de vivre. On ne peut [[dire]] la |
− | mort advenue sans meurtrir encore. J'y renonce, l'ayant tenté, pour | + | [[mort]] advenue sans meurtrir [[encore]]. J'y renonce, l'ayant tenté, pour |
malgré moi porter au-delà mon hommage.</font></font> | malgré moi porter au-delà mon hommage.</font></font> | ||
<br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">Me recueillant pourtant | <br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">Me recueillant pourtant | ||
− | au souvenir de ce que j'ai senti de l'homme en un moment pour lui de patience | + | au souvenir de ce que j'ai senti de l'[[homme]] en un [[moment]] pour lui de patience |
amère.</font></font> | amère.</font></font> | ||
− | <br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">2. Que faire d'autre que | + | <br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">2. Que faire d'[[autre]] que |
− | d'interroger le point que met l'heure soudaine à un discours où | + | d'interroger le point que met l'heure soudaine à un [[discours]] où |
nous sommes tous entrés ?</font></font> | nous sommes tous entrés ?</font></font> | ||
<br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">Et son dernier article qu'on | <br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">Et son dernier article qu'on | ||
reproduit ici, titre <i>l'Oeil et l'Esprit</i>, - en parler d'où | reproduit ici, titre <i>l'Oeil et l'Esprit</i>, - en parler d'où | ||
− | il est fait, si<b> </b>j'en crois le signe d'une tête propice, pour | + | il est fait, si<b> </b>j'en crois le [[signe]] d'une tête propice, pour |
− | que je l'entende : de ma place.</font></font> | + | que je l'entende : de ma [[place]].</font></font> |
<br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">3. C'est bien la dominante | <br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">3. C'est bien la dominante | ||
et la sensible de l'oeuvre entière qui donnent ici leur note. Si | et la sensible de l'oeuvre entière qui donnent ici leur note. Si | ||
on la tient pour ce qu'elle est : d'un philosophe, au sens de ce qu'un | on la tient pour ce qu'elle est : d'un philosophe, au sens de ce qu'un | ||
− | choix qui à seize ans y aperçoit son avenir (il l'attesta), | + | [[choix]] qui à seize ans y aperçoit son avenir (il l'attesta), |
y nécessite de professionnel. C'est dire que le lien proprement | y nécessite de professionnel. C'est dire que le lien proprement | ||
− | universitaire couvre et retient son intention, même éprouvé | + | universitaire couvre et retient son [[intention]], même éprouvé |
impatiemment, même élargi jusqu'à la lutte publique.</font></font> | impatiemment, même élargi jusqu'à la lutte publique.</font></font> | ||
<br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">4. Ce n'est pas là | <br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">4. Ce n'est pas là | ||
pourtant ce qui insère cet article dans le sentiment, pointé | pourtant ce qui insère cet article dans le sentiment, pointé | ||
deux fois en son exorde et en sa chute, d'un changement très actuel | deux fois en son exorde et en sa chute, d'un changement très actuel | ||
− | à devenir patent dans la science. Ce qu'il évoque comme vent | + | à devenir patent dans la [[science]]. Ce qu'il évoque comme vent |
− | de mode pour les registres de la communication, complaisance pour les versalités | + | de mode pour les registres de la [[communication]], complaisance pour les versalités |
− | opérationnelles, n'est noté que comme apparence qui doit | + | opérationnelles, n'est noté que comme [[apparence]] qui doit |
conduire à sa raison.</font></font> | conduire à sa raison.</font></font> | ||
<br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">C'est la même à | <br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">C'est la même à | ||
− | quoi nous tentons de contribuer du champ privilégié à | + | quoi nous tentons de contribuer du [[champ]] privilégié à |
− | la révéler qu'est le nôtre (la psychanalyse freudienne) | + | la révéler qu'est le nôtre (la [[psychanalyse]] freudienne) |
− | : la raison par quoi le signifiant s'avère premier en toute constitution | + | : la raison par quoi le [[signifiant]] s'avère premier en toute [[constitution]] |
− | d'un <a name="sujet"></a>sujet.</font></font> | + | d'un <a [[name]]="[[sujet]]"></a>sujet.</font></font> |
<br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">5. L'oeil pris ici pour | <br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">5. L'oeil pris ici pour | ||
− | centre d'une | + | centre d'une ré[[vision]] du statut de l'esprit comporte cependant toutes |
− | les résonances possibles de la tradition où la pensée | + | les résonances possibles de la [[tradition]] où la pensée |
− | reste engagée.</font></font> | + | [[reste]] engagée.</font></font> |
<br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">C'est ainsi que Maurice | <br><font face="Arial,Helvetica"><font size="-1">C'est ainsi que Maurice | ||
Merleau-Ponty, comme quiconque en cette voie, ne peut faire que de se référer | Merleau-Ponty, comme quiconque en cette voie, ne peut faire que de se référer | ||
− | une fois de plus à l'oeil abstrait que suppose le concept cartésien | + | une fois de plus à l'oeil abstrait que suppose le [[concept]] cartésien |
de l'étendue, avec son corrélatif d'un sujet, module divin | de l'étendue, avec son corrélatif d'un sujet, module divin | ||
− | d'une perception universelle.</font></font> | + | d'une [[perception]] universelle.</font></font> |
<br><font size="-1"><font face="Arial,Helvetica">Faire la critique proprement | <br><font size="-1"><font face="Arial,Helvetica">Faire la critique proprement | ||
phénoménologique de l'esthétique qui </font>résulte | phénoménologique de l'esthétique qui </font>résulte | ||
de cette raréfaction de la foi faite à l'oeil n'est pas pour | de cette raréfaction de la foi faite à l'oeil n'est pas pour | ||
− | nous ramener aux vertus de connaissance de la contemplation proposée | + | nous ramener aux vertus de [[connaissance]] de la contemplation proposée |
à l'ascèse du <i>nous </i>par la théorie antique.</font> | à l'ascèse du <i>nous </i>par la théorie antique.</font> | ||
<br><font size="-1">Ce n'est point non plus pour nous attarder au problème | <br><font size="-1">Ce n'est point non plus pour nous attarder au problème | ||
− | des illusions optiques et de savoir si</font><font size="-2"> </font><font size="-1">le | + | des illusions optiques et de [[savoir]] si</font><font size="-2"> </font><font size="-1">le |
bâton rompu par la surface de l'eau dans le bassin, la lune plus | bâton rompu par la surface de l'eau dans le bassin, la lune plus | ||
grosse d'aborder l'horizon, nous montrent ou non la réalité | grosse d'aborder l'horizon, nous montrent ou non la réalité | ||
− | : Alain dans son nuage de craie y suffit.</font> | + | : [[Alain]] dans son nuage de craie y suffit.</font> |
− | <br><font size="-1">Disons-le parce que même Maurice Merleau-Ponty | + | <br><font size="-1">Disons-le parce que même [[Maurice Merleau-Ponty]] |
ne semble pas franchir ce pas : pourquoi ne pas entériner le fait | ne semble pas franchir ce pas : pourquoi ne pas entériner le fait | ||
− | que la théorie de la perception n'intéresse plus la structure | + | que la théorie de la perception n'intéresse plus la [[structure]] |
de la réalité à quoi la science nous a fait accéder | de la réalité à quoi la science nous a fait accéder | ||
en physique. Rien de plus contestable, tant dans l'histoire de la science | en physique. Rien de plus contestable, tant dans l'histoire de la science | ||
que dans son produit fini, que ce motif dont il se prend à autoriser | que dans son produit fini, que ce motif dont il se prend à autoriser | ||
− | sa recherche qu'issue de la perception, la construction scientifique y | + | sa recherche qu'issue de la perception, la [[construction]] scientifique y |
devrait toujours revenir. Bien plutôt tout nous montre-t-il que c'est | devrait toujours revenir. Bien plutôt tout nous montre-t-il que c'est | ||
en refusant les intuitions perçues du pondéral et de l'<i>impetus | en refusant les intuitions perçues du pondéral et de l'<i>impetus | ||
Line 89: | Line 89: | ||
la dynamique galiléenne a annexé les cieux à la terre, | la dynamique galiléenne a annexé les cieux à la terre, | ||
mais au prix d'y introduire ce que nous touchons aujourd'hui dans l'expérience | mais au prix d'y introduire ce que nous touchons aujourd'hui dans l'expérience | ||
− | du cosmonaute : un corps qui peut s'ouvrir et se fermer sans peser en rien | + | du cosmonaute : un [[corps]] qui peut s'ouvrir et se fermer sans peser en rien |
ni sur rien.</font> | ni sur rien.</font> | ||
<br><font size="-1">6. La phénoménologie de la perception est | <br><font size="-1">6. La phénoménologie de la perception est | ||
− | donc bien autre chose qu'un codicille à une théorie de la | + | donc bien autre [[chose]] qu'un codicille à une théorie de la |
− | connaissance dont les débris font l'attirail d'une psychologie précaire.</font> | + | connaissance dont les débris font l'attirail d'une [[psychologie]] précaire.</font> |
<br><font size="-1">Elle n'est pas plus situable dans la visée, qui | <br><font size="-1">Elle n'est pas plus situable dans la visée, qui | ||
n'habite plus à présent que le logicisme, d'un savoir absolu.</font> | n'habite plus à présent que le logicisme, d'un savoir absolu.</font> | ||
Line 101: | Line 101: | ||
et leur stimulation pour la pensée, sinon la dérision où | et leur stimulation pour la pensée, sinon la dérision où | ||
elles font paraître les bêtifications séculaires sur | elles font paraître les bêtifications séculaires sur | ||
− | l'illusion d'Aristote, voire l'examen clinique moyen de l'ophtalmologiste.</font> | + | l'[[illusion]] d'Aristote, voire l'examen clinique moyen de l'ophtalmologiste.</font> |
<br><font size="-1">Pour en faire saisir l'intérêt, choisissons | <br><font size="-1">Pour en faire saisir l'intérêt, choisissons | ||
un petit fait dans l'immense trame de covariances de même style qui | un petit fait dans l'immense trame de covariances de même style qui | ||
Line 107: | Line 107: | ||
360 de l'éclairage violent qui apparaît en manière | 360 de l'éclairage violent qui apparaît en manière | ||
de cône blanchâtre pour ce que le supporte un disque, àpeine | de cône blanchâtre pour ce que le supporte un disque, àpeine | ||
− | visible d'être noir et surtout d'être le seul objet qui l'arrête. | + | [[visible]] d'être noir et surtout d'être le seul [[objet]] qui l'arrête. |
Il suffit d'y interposer un petit carré de papier blanc pour qu'aussitôt | Il suffit d'y interposer un petit carré de papier blanc pour qu'aussitôt | ||
− | l'aspect laiteux s'en dissipe et que se | + | l'aspect laiteux s'en dissipe et que se dé[[tache]] comme distinct d'être |
éclairé en son contraste le disque noir.</font> | éclairé en son contraste le disque noir.</font> | ||
− | <br><font size="-1">Mille autres faits sont de nature à nous imposer | + | <br><font size="-1">Mille autres faits sont de [[nature]] à nous imposer |
la question de ce qui règle les mutations souvent saisissantesque | la question de ce qui règle les mutations souvent saisissantesque | ||
nous observons par l'addition d'un élément nouveau dans l'équilibre | nous observons par l'addition d'un élément nouveau dans l'équilibre | ||
de ces facteurs expérimentalement distingués que sont l'éclairage, | de ces facteurs expérimentalement distingués que sont l'éclairage, | ||
− | les conditions fonds-forme de l'objet, notre savoir à son endroit, | + | les [[conditions]] fonds-forme de l'objet, notre savoir à son endroit, |
et tiers élément, ici le vif, une pluralité de gradations | et tiers élément, ici le vif, une pluralité de gradations | ||
que le terme de couleur est insuffisant à désigner, puisqu'outre | que le terme de couleur est insuffisant à désigner, puisqu'outre | ||
Line 125: | Line 125: | ||
à l'artifice de laboratoire. Comme il s'éprouve de ce que | à l'artifice de laboratoire. Comme il s'éprouve de ce que | ||
le phénomène visuel de la couleur locale d'un objet n'a rien | le phénomène visuel de la couleur locale d'un objet n'a rien | ||
− | à faire avec celui de la plage colorée du spectre.</font> | + | à faire avec celui de la plage colorée du [[spectre]].</font> |
<br><font size="-1">Qu'il nous suffise d'indiquer dans quelle direction le | <br><font size="-1">Qu'il nous suffise d'indiquer dans quelle direction le | ||
philosophe tente d'articuler ces faits, en tant qu'il est fondé | philosophe tente d'articuler ces faits, en tant qu'il est fondé | ||
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<br><font size="-1">7. Cette direction exigée vers ce qui ordonne | <br><font size="-1">7. Cette direction exigée vers ce qui ordonne | ||
les covariances phénoménalement définies de la perception, | les covariances phénoménalement définies de la perception, | ||
− | le philosophe de notre temps va la chercher, on le sait, dans la notion | + | le philosophe de notre temps va la chercher, on le sait, dans la [[notion]] |
de la présence, ou pour mieux en traduire littéralement le | de la présence, ou pour mieux en traduire littéralement le | ||
terme de l'allemand, de l'Être-là, à quoi il faut ajouter | terme de l'allemand, de l'Être-là, à quoi il faut ajouter | ||
présence (ou Être-là) -dans-par-à travers-un-corps. | présence (ou Être-là) -dans-par-à travers-un-corps. | ||
− | Position dite de l'existence, en tant qu'elle essaie de se saisir dans | + | [[Position]] dite de l'[[existence]], en tant qu'elle essaie de se saisir dans |
le moment d'avant la réflexion qui dans son expérience introduit | le moment d'avant la réflexion qui dans son expérience introduit | ||
− | sa distinction décisive d'avec le monde en l'éveillant à | + | sa [[distinction]] décisive d'avec le monde en l'éveillant à |
− | la conscience-de-soi.</font> | + | la [[conscience]]-de-soi.</font> |
<br><font size="-1">Même restituée trop évidemment à | <br><font size="-1">Même restituée trop évidemment à | ||
partir de la réflexion redoublée que constitue la recherche | partir de la réflexion redoublée que constitue la recherche | ||
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- et dont il faut rendre justice à Maurice Merleau-Ponty de n'y | - et dont il faut rendre justice à Maurice Merleau-Ponty de n'y | ||
faire plus, au dernier point, de référence à aucune | faire plus, au dernier point, de référence à aucune | ||
− | <i>Gestalt | + | <i>[[Gestalt]] |
</i>naturaliste | </i>naturaliste | ||
- pour non y opposer, mais y accorder le sujet lui-même.</font> | - pour non y opposer, mais y accorder le sujet lui-même.</font> | ||
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laiteuse, au second temps n'y est plus que refoulé. Et ce, par le | laiteuse, au second temps n'y est plus que refoulé. Et ce, par le | ||
fait du contraste objectivant du disque noir avec le carré blanc | fait du contraste objectivant du disque noir avec le carré blanc | ||
− | qui s'opère de l'entrée significative de la figure de ce | + | qui s'opère de l'entrée significative de la [[figure]] de ce |
dernier sur le fonds de l'autre. Mais le sujet qui là s'affirme | dernier sur le fonds de l'autre. Mais le sujet qui là s'affirme | ||
en formes éclairées est le rejet de l'<a name="Autre"></a>Autre | en formes éclairées est le rejet de l'<a name="Autre"></a>Autre | ||
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<br><font size="-1">Pour tout dire, il nous semble que le « je pense | <br><font size="-1">Pour tout dire, il nous semble que le « je pense | ||
» auquel on entend réduire la présence,<sub> </sub>ne | » auquel on entend réduire la présence,<sub> </sub>ne | ||
− | cesse pas d'impliquer, à quelque | + | cesse pas d'impliquer, à quelque indé[[termination]] qu'on l'oblige, |
tous les pouvoirs de la réflexion par quoi se confondent sujet et | tous les pouvoirs de la réflexion par quoi se confondent sujet et | ||
conscience, soit nommément le mirage que l'expérience psychanalytique | conscience, soit nommément le mirage que l'expérience psychanalytique | ||
− | met au principe de la méconnaissance du sujet et que nous-même | + | met au principe de la [[méconnaissance]] du sujet et que nous-même |
− | avons tenté de cerner dans le stade du miroir en l'y résumant.</font> | + | avons tenté de cerner dans le [[stade du miroir]] en l'y résumant.</font> |
<br><font size="-1">Quoi qu'il en soit, nous avons revendiqué ailleurs, | <br><font size="-1">Quoi qu'il en soit, nous avons revendiqué ailleurs, | ||
− | nommément sur le sujet de l'hallucination verbale <sup><a href="#2">2</a></sup>, | + | nommément sur le sujet de l'[[hallucination]] verbale <sup><a href="#2">2</a></sup>, |
le privilège qui revient <i>au perceptum </i>du signifiant dans | le privilège qui revient <i>au perceptum </i>du signifiant dans | ||
la conversion à opérer du rapport du <i>percipiens </i>au | la conversion à opérer du rapport du <i>percipiens </i>au | ||
Line 204: | Line 204: | ||
de l'ouvrage de Maurice Merleau-Ponty sur le corps comme être sexué | de l'ouvrage de Maurice Merleau-Ponty sur le corps comme être sexué | ||
<sup><a href="#3">3</a></sup>et | <sup><a href="#3">3</a></sup>et | ||
− | sur le corps comme expression dans la parole <sup><a href="#4">4</a></sup></font>. | + | sur le corps comme expression dans la [[parole]] <sup><a href="#4">4</a></sup></font>. |
<br><font size="-1">Le premier ne le cède pas en séduction | <br><font size="-1">Le premier ne le cède pas en séduction | ||
à la séduction à quoi l'on avoue y céder de | à la séduction à quoi l'on avoue y céder de | ||
− | l'analyse existentielle, d'une élégance fabuleuse, à | + | l'[[analyse]] existentielle, d'une élégance fabuleuse, à |
− | quoi J.-P. Sartre se livre de la relation du désir <sup><a href="#5">5</a></sup>. | + | quoi J.-P. [[Sartre]] se livre de la relation du [[désir]] <sup><a href="#5">5</a></sup>. |
− | De l'engluement de la</font> <font size="-1">conscience dans la chair à | + | De l'engluement de la</font> <font size="-1">conscience dans la [[chair]] à |
− | la quête dans l'autre d'un sujet impossible à saisir parce | + | la quête dans l'autre d'un sujet [[impossible]] à saisir parce |
que le tenir en sa liberté, c'est l'éteindre, de cette levée | que le tenir en sa liberté, c'est l'éteindre, de cette levée | ||
− | pathétique d'un gibier qui se dissipe avec le coup, qui ne le traverse | + | pathétique d'un gibier qui se dissipe avec le coup, qui ne le [[traverse]] |
− | même pas, du plaisir, ce n'est pas seulement l'accident mais l'issue | + | même pas, du [[plaisir]], ce n'est pas seulement l'accident mais l'issue |
− | qui impose à l'auteur son virage, en son redoublement d'impasse, | + | qui impose à l'auteur son virage, en son redoublement d'[[impasse]], |
− | dans un</font><font size="-2"> </font><font size="-1">sadisme, qui n'a plus | + | dans un</font><font size="-2"> </font><font size="-1">[[sadisme]], qui n'a plus |
d'autre échappatoire que masochiste.</font> | d'autre échappatoire que masochiste.</font> | ||
<br><font size="-1">Maurice Merleau-Ponty, pour en inverser le mouvement, | <br><font size="-1">Maurice Merleau-Ponty, pour en inverser le mouvement, | ||
semble en éviter la déviation fatale, en y décrivant | semble en éviter la déviation fatale, en y décrivant | ||
le procès d'une révélation directe du corps au corps. | le procès d'une révélation directe du corps au corps. | ||
− | Elle ne tient à vrai dire que de l'évocation d'une situation | + | Elle ne tient à [[vrai]] dire que de l'évocation d'une [[situation]] |
pensée ailleurs comme humiliante, laquelle comme pensée de | pensée ailleurs comme humiliante, laquelle comme pensée de | ||
la situation supplée au tiers, que l'analyse a montré être | la situation supplée au tiers, que l'analyse a montré être | ||
− | inhérent dans</font><font size="-2"> </font><font size="-1">l'inconscient | + | inhérent dans</font><font size="-2"> </font><font size="-1">l'[[inconscient]] |
à | à | ||
la situation amoureuse.</font> | la situation amoureuse.</font> | ||
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un freudien la</font><font size="-2"> </font><font size="-1">reconstruction | un freudien la</font><font size="-2"> </font><font size="-1">reconstruction | ||
de Sartre. Sa critique nécessiterait une précision, même | de Sartre. Sa critique nécessiterait une précision, même | ||
− | pas encore bien reconnue dans la psychanalyse, de la fonction du fantasme. | + | pas encore bien reconnue dans la psychanalyse, de la [[fonction]] du [[fantasme]]. |
− | Nulle restitution imaginaire des effets de la cruauté ne peut y | + | Nulle restitution [[imaginaire]] des effets de la cruauté ne peut y |
− | suppléer, et il n'est pas vrai que la voie vers la satisfaction | + | suppléer, et il n'est pas vrai que la voie vers la [[satisfaction]] |
normale du désir se retrouve de l'échec inhérent à | normale du désir se retrouve de l'échec inhérent à | ||
la préparation du supplice <sup><a href="#6">6</a></sup>. Sa description | la préparation du supplice <sup><a href="#6">6</a></sup>. Sa description | ||
Line 238: | Line 238: | ||
moins du mythe sadianiste. Car son passage par la réduction du corps | moins du mythe sadianiste. Car son passage par la réduction du corps | ||
de l'autre à l'obscène se heurte au paradoxe, bien autrement | de l'autre à l'obscène se heurte au paradoxe, bien autrement | ||
− | énigmatique à le voir rayonner dans Sade, et combien plus | + | énigmatique à le [[voir]] rayonner dans [[Sade]], et combien plus |
suggestif dans le registre existentiel, de la beauté comme insensible | suggestif dans le registre existentiel, de la beauté comme insensible | ||
à l'outrage <sup><a href="#7">7</a></sup>. L'accès <a name="érotologie"></a>érotologique | à l'outrage <sup><a href="#7">7</a></sup>. L'accès <a name="érotologie"></a>érotologique | ||
pourrait donc être ici meilleur, même hors de toute expérience | pourrait donc être ici meilleur, même hors de toute expérience | ||
− | de l'inconscient.</font> | + | de [[l'inconscient]].</font> |
<br><font size="-1">Mais il est clair que rien dans la phénoménologie | <br><font size="-1">Mais il est clair que rien dans la phénoménologie | ||
de l'extrapolation perceptive, si loin qu'on l'articule dans la poussée | de l'extrapolation perceptive, si loin qu'on l'articule dans la poussée | ||
obscure ou lucide du corps, ne peut rendre compte ni du privilège | obscure ou lucide du corps, ne peut rendre compte ni du privilège | ||
− | du fétiche dans une expérience séculaire, ni du complexe | + | du fétiche dans une expérience séculaire, ni du [[complexe]] |
− | de castration dans la découverte freudienne. Les deux se conjurent | + | de [[castration]] dans la découverte freudienne. Les deux se conjurent |
pourtant pour nous sommer de faire face à la fonction de signifiant | pourtant pour nous sommer de faire face à la fonction de signifiant | ||
de l'organe toujours signalé comme tel par s<a></a><a></a>on occultation dans | de l'organe toujours signalé comme tel par s<a></a><a></a>on occultation dans | ||
− | le simulacre humain, - et l'incidence qui résulte du phallus en | + | le simulacre [[humain]], - et l'incidence qui résulte du [[phallus]] en |
− | cette fonction dans l'accès au désir tant de la femme que | + | cette fonction dans l'accès au désir tant de la [[femme]] que |
de l'homme, pour être maintenant vulgarisée, ne peut pas être | de l'homme, pour être maintenant vulgarisée, ne peut pas être | ||
négligée comme déviant ce qu'on peut bien appeler | négligée comme déviant ce qu'on peut bien appeler | ||
Line 259: | Line 259: | ||
pour sa position doublement celée dans le fantasme,</font> <font size="-1">soit | pour sa position doublement celée dans le fantasme,</font> <font size="-1">soit | ||
de ne s'indiquer que là où il n'agit pas et de n'agir que | de ne s'indiquer que là où il n'agit pas et de n'agir que | ||
− | de son</font> <font size="-1">manque. C'est en quoi la psychanalyse doit | + | de son</font> <font size="-1">[[manque]]. C'est en quoi la psychanalyse doit |
faire sa preuve d'un</font> <font size="-1">avancement dans l'accès | faire sa preuve d'un</font> <font size="-1">avancement dans l'accès | ||
au signifiant, et tel qu'il puisse revenir sur sa</font> <font size="-1">phénoménologie | au signifiant, et tel qu'il puisse revenir sur sa</font> <font size="-1">phénoménologie | ||
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mieux filée, la même</font> <font size="-1">thématique | mieux filée, la même</font> <font size="-1">thématique | ||
dont je les entretiens sur la primauté du signifiant dans l'effetde | dont je les entretiens sur la primauté du signifiant dans l'effetde | ||
− | signifier. Et je me remémore l'appui que j'ai pu y trouver aux primesvacances | + | [[signifier]]. Et je me remémore l'appui que j'ai pu y trouver aux primesvacances |
d'après la guerre, quand mûrissait mon embarras d'avoir à | d'après la guerre, quand mûrissait mon embarras d'avoir à | ||
ranimer dans un groupe épars encore une communication jusque-là | ranimer dans un groupe épars encore une communication jusque-là | ||
Line 289: | Line 289: | ||
le sujet comme rejet de la chaîne</font> <font size="-1">signifiante, | le sujet comme rejet de la chaîne</font> <font size="-1">signifiante, | ||
qui du même coup se constitue comme refoulé primordial.</font></ul> | qui du même coup se constitue comme refoulé primordial.</font></ul> | ||
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même dans ses œuvres dites abstraites, au nom du malentendu que l'éthique | même dans ses œuvres dites abstraites, au nom du malentendu que l'éthique | ||
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la recherche de Maurice Merleau-Ponty, la peinture intervient déjà | la recherche de Maurice Merleau-Ponty, la peinture intervient déjà | ||
dans la phénoménologie de la perception, entendons dans l'ouvrage, | dans la phénoménologie de la perception, entendons dans l'ouvrage, | ||
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intéresser le champ du désir que le terrain de l'art prenne | intéresser le champ du désir que le terrain de l'art prenne | ||
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− | ordinairement des psychanalystes eux-mêmes, ce que Freud articule | + | ordinairement des psychanalystes eux-mêmes, ce que [[Freud]] articule |
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<br><font size="-1">Comment s'égaler à la pesée subtile | <br><font size="-1">Comment s'égaler à la pesée subtile | ||
qui se poursuit ici d'un éros de l'oeil, d'une corporalité | qui se poursuit ici d'un éros de l'oeil, d'une corporalité | ||
de la lumière où ne s'évoquent plus que nostalgiquement | de la lumière où ne s'évoquent plus que nostalgiquement | ||
leur théologique primauté ?</font> | leur théologique primauté ?</font> | ||
− | <br><font size="-1">Pour l'organe, de son glissement presque imperceptible | + | <br><font size="-1">Pour l'organe, de son [[glissement]] presque imperceptible |
du sujet vers l'objet, faut-il pour rendre compte s'armer de l'insolence | du sujet vers l'objet, faut-il pour rendre compte s'armer de l'insolence | ||
d'une bonne nouvelle qui, de ses paraboles déclarant les forger | d'une bonne nouvelle qui, de ses paraboles déclarant les forger | ||
expressément pour qu'elles ne soient point entendues, nous traverse | expressément pour qu'elles ne soient point entendues, nous traverse | ||
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que l'oeil est fait pour ne point voir ?</font> | que l'oeil est fait pour ne point voir ?</font> | ||
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pour voir le désir pâlir à son aspect non de ce qu'elle | pour voir le désir pâlir à son aspect non de ce qu'elle | ||
soit aveugle, comme on le croit, mais de ce qu'elle ne puisse pas ne pas | soit aveugle, comme on le croit, mais de ce qu'elle ne puisse pas ne pas | ||
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c'est la place de ce qui ne saurait se voir : encore faudrait-il le nommer.</font> | c'est la place de ce qui ne saurait se voir : encore faudrait-il le nommer.</font> | ||
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délicat dont Maurice Merleau-Ponty en modèle le phénomène | délicat dont Maurice Merleau-Ponty en modèle le phénomène | ||
en nous disant qu'elle nous <i>conduit </i>vers l'objet éclairé | en nous disant qu'elle nous <i>conduit </i>vers l'objet éclairé | ||
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</i>intolérable | </i>intolérable | ||
à qui le sort me force à rendre la cariatide d'un mortel, | à qui le sort me force à rendre la cariatide d'un mortel, | ||
− | barre mon propos, fût brisé.</font> | + | [[barre]] mon propos, fût brisé.</font> |
<center><font size="-1">Les Temps Modernes - 1961</font> | <center><font size="-1">Les Temps Modernes - 1961</font> | ||
<br><font size="-1">(numéro spécial sur Maurice Merleau-Ponty)</font></center> | <br><font size="-1">(numéro spécial sur Maurice Merleau-Ponty)</font></center> | ||
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de la perception, </i>in-8, 531 pages. Gaillard, 1945.</font> | de la perception, </i>in-8, 531 pages. Gaillard, 1945.</font> | ||
− | <br><a name="2"></a><font size="-1">2. In <i>La Psychanalyse. </i>vol. 4, | + | <br><a name="2"></a><font size="-1">2. In <i>[[La Psychanalyse]]. </i>vol. 4, |
pp.1-5 et<b> </b>la suite. P.U.F.</font> | pp.1-5 et<b> </b>la suite. P.U.F.</font> | ||
Latest revision as of 19:19, 20 May 2019
Maurice Merleau-Ponty
<a href="../../../pensbete.htm"></a>
- 1. On peut exhaler le cri
qui nie que l'amitié puisse cesser de vivre. On ne peut dire la
mort advenue sans meurtrir encore. J'y renonce, l'ayant tenté, pour
malgré moi porter au-delà mon hommage.
- la raison par quoi le signifiant s'avère premier en toute constitution
- Alain dans son nuage de craie y suffit.
- jeter, n'implique-t-elle pas déjà l'essence vraie
Me recueillant pourtant au souvenir de ce que j'ai senti de l'homme en un moment pour lui de patience amère.
2. Que faire d'autre que d'interroger le point que met l'heure soudaine à un discours où nous sommes tous entrés ?
Et son dernier article qu'on reproduit ici, titre l'Oeil et l'Esprit, - en parler d'où il est fait, si j'en crois le signe d'une tête propice, pour que je l'entende : de ma place.
3. C'est bien la dominante et la sensible de l'oeuvre entière qui donnent ici leur note. Si on la tient pour ce qu'elle est : d'un philosophe, au sens de ce qu'un choix qui à seize ans y aperçoit son avenir (il l'attesta), y nécessite de professionnel. C'est dire que le lien proprement universitaire couvre et retient son intention, même éprouvé impatiemment, même élargi jusqu'à la lutte publique.
4. Ce n'est pas là pourtant ce qui insère cet article dans le sentiment, pointé deux fois en son exorde et en sa chute, d'un changement très actuel à devenir patent dans la science. Ce qu'il évoque comme vent de mode pour les registres de la communication, complaisance pour les versalités opérationnelles, n'est noté que comme apparence qui doit conduire à sa raison.
C'est la même à quoi nous tentons de contribuer du champ privilégié à la révéler qu'est le nôtre (la psychanalyse freudienne)
5. L'oeil pris ici pour centre d'une révision du statut de l'esprit comporte cependant toutes les résonances possibles de la tradition où la pensée reste engagée.
C'est ainsi que Maurice Merleau-Ponty, comme quiconque en cette voie, ne peut faire que de se référer une fois de plus à l'oeil abstrait que suppose le concept cartésien de l'étendue, avec son corrélatif d'un sujet, module divin d'une perception universelle.
Faire la critique proprement phénoménologique de l'esthétique qui résulte de cette raréfaction de la foi faite à l'oeil n'est pas pour nous ramener aux vertus de connaissance de la contemplation proposée à l'ascèse du nous par la théorie antique.
Ce n'est point non plus pour nous attarder au problème des illusions optiques et de savoir si le bâton rompu par la surface de l'eau dans le bassin, la lune plus grosse d'aborder l'horizon, nous montrent ou non la réalité
Disons-le parce que même Maurice Merleau-Ponty ne semble pas franchir ce pas : pourquoi ne pas entériner le fait que la théorie de la perception n'intéresse plus la structure de la réalité à quoi la science nous a fait accéder en physique. Rien de plus contestable, tant dans l'histoire de la science que dans son produit fini, que ce motif dont il se prend à autoriser sa recherche qu'issue de la perception, la construction scientifique y devrait toujours revenir. Bien plutôt tout nous montre-t-il que c'est en refusant les intuitions perçues du pondéral et de l'impetus que la dynamique galiléenne a annexé les cieux à la terre, mais au prix d'y introduire ce que nous touchons aujourd'hui dans l'expérience du cosmonaute : un corps qui peut s'ouvrir et se fermer sans peser en rien ni sur rien.
6. La phénoménologie de la perception est donc bien autre chose qu'un codicille à une théorie de la connaissance dont les débris font l'attirail d'une psychologie précaire.
Elle n'est pas plus situable dans la visée, qui n'habite plus à présent que le logicisme, d'un savoir absolu.
Elle est ce qu'elle est : à savoir une collation d'expériences dont il faut lire l'ouvrage inaugural de Maurice Merleau-Ponty<a href="#1"> 1</a> pour mesurer les recherches positives qui s'y sont accumulées, et leur stimulation pour la pensée, sinon la dérision où elles font paraître les bêtifications séculaires sur l'illusion d'Aristote, voire l'examen clinique moyen de l'ophtalmologiste.
Pour en faire saisir l'intérêt, choisissons un petit fait dans l'immense trame de covariances de même style qui sont commentées en cet ouvrage, celui par exemple à la page 360 de l'éclairage violent qui apparaît en manière de cône blanchâtre pour ce que le supporte un disque, àpeine visible d'être noir et surtout d'être le seul objet qui l'arrête. Il suffit d'y interposer un petit carré de papier blanc pour qu'aussitôt l'aspect laiteux s'en dissipe et que se détache comme distinct d'être éclairé en son contraste le disque noir.
Mille autres faits sont de nature à nous imposer la question de ce qui règle les mutations souvent saisissantesque nous observons par l'addition d'un élément nouveau dans l'équilibre de ces facteurs expérimentalement distingués que sont l'éclairage, les conditions fonds-forme de l'objet, notre savoir à son endroit, et tiers élément, ici le vif, une pluralité de gradations que le terme de couleur est insuffisant à désigner, puisqu'outre la constance qui tend à rétablir dans certaines conditions une identité perçue avec la gamme dénommable sous des longueurs d'onde différentes, il y a les effets conjugués de reflet, de rayonnement, de transparence dont la corrélation n'est même pas entièrement réductible de la trouvaille d'art à l'artifice de laboratoire. Comme il s'éprouve de ce que le phénomène visuel de la couleur locale d'un objet n'a rien à faire avec celui de la plage colorée du spectre.
Qu'il nous suffise d'indiquer dans quelle direction le philosophe tente d'articuler ces faits, en tant qu'il est fondé à leur donner asile, soit en ceci au moins que tout un art de création humaine s'y rattache que la réalité physicienne réfute d'autant moins qu'elle s'en éloigne toujours plus, mais qu'il n'est pas dit pour autant que cet art n'a de valeur que d'agrément, et qu'il ne recèle pas quelque autre accès à un être, dès lors peut-être plus essentiel.
7. Cette direction exigée vers ce qui ordonne les covariances phénoménalement définies de la perception, le philosophe de notre temps va la chercher, on le sait, dans la notion de la présence, ou pour mieux en traduire littéralement le terme de l'allemand, de l'Être-là, à quoi il faut ajouter présence (ou Être-là) -dans-par-à travers-un-corps. Position dite de l'existence, en tant qu'elle essaie de se saisir dans le moment d'avant la réflexion qui dans son expérience introduit sa distinction décisive d'avec le monde en l'éveillant à la conscience-de-soi.
Même restituée trop évidemment à partir de la réflexion redoublée que constitue la recherche phénoménologique cette position se targuera de restaurer la pureté de cette présence à la racine du phénomène, dans ce qu'elle peut globalement anticiper de sa mouvance dans le monde. Car bien entendu des complexités homologues s'ajoutent du mouvement, du tact voire de l'audition, comment omettre du vertige, qui ne se juxtaposent pas mais se composent avec les phénomènes de la vision.
C'est cette présupposition qu'il y ait quelque part un lieu de l'unité, qui est bien faite pour suspendre notre assentiment. Non qu'il ne soit manifeste que ce lieu soit écarté de toute assignation physiologique, et que nous ne soyons satisfaits de suivre en son détail une subjectivité constituante là où elle se tisse fil à fil, mais non pas réduite à être son envers, avec ce qu'on appelle ici l'objectivité totale.
Ce qui nous étonne, c'est qu'on ne profite pas aussitôt de la structure si manifeste dans le phénomène, - et dont il faut rendre justice à Maurice Merleau-Ponty de n'y faire plus, au dernier point, de référence à aucune Gestalt naturaliste - pour non y opposer, mais y accorder le sujet lui-même.
Qu'est-ce qui objecte à dire de l'exemple plus haut cité, - où l'éclairage est manifestement homologue du tonus musculaire dans les expériences sur la constance de la perception du poids, mais ne saurait masquer sa localité d'Autre -, que le sujet en tant qu'au premier temps il l'investit de sa consistance laiteuse, au second temps n'y est plus que refoulé. Et ce, par le fait du contraste objectivant du disque noir avec le carré blanc qui s'opère de l'entrée significative de la figure de ce dernier sur le fonds de l'autre. Mais le sujet qui là s'affirme en formes éclairées est le rejet de l'<a name="Autre"></a>Autre qui s'incarnait en une <a name="opacité"></a>opacité de lumière.
Mais où est le primum, et pourquoi préjuger de ce qu'il soit seulement un percipiens quand il se dessine que c'est son élision qui rend au perceptum de la lumière elle-même sa transparence.
Pour tout dire, il nous semble que le « je pense » auquel on entend réduire la présence, ne cesse pas d'impliquer, à quelque indétermination qu'on l'oblige, tous les pouvoirs de la réflexion par quoi se confondent sujet et conscience, soit nommément le mirage que l'expérience psychanalytique met au principe de la méconnaissance du sujet et que nous-même avons tenté de cerner dans le stade du miroir en l'y résumant.
Quoi qu'il en soit, nous avons revendiqué ailleurs, nommément sur le sujet de l'hallucination verbale <a href="#2">2</a>, le privilège qui revient au perceptum du signifiant dans la conversion à opérer du rapport du percipiens au sujet.
8. La phénoménologie de la perception àvouloir se résoudre en la présence par le corps, évite cette conversion, mais se condamne à la fois à déborder de son champ et à se rendre inaccessible une expérience qui lui est étrangère. C'est ce qu'illustrent les deux chapitres de l'ouvrage de Maurice Merleau-Ponty sur le corps comme être sexué <a href="#3">3</a>et sur le corps comme expression dans la parole <a href="#4">4</a>.
Le premier ne le cède pas en séduction à la séduction à quoi l'on avoue y céder de l'analyse existentielle, d'une élégance fabuleuse, à quoi J.-P. Sartre se livre de la relation du désir <a href="#5">5</a>. De l'engluement de la conscience dans la chair à la quête dans l'autre d'un sujet impossible à saisir parce que le tenir en sa liberté, c'est l'éteindre, de cette levée pathétique d'un gibier qui se dissipe avec le coup, qui ne le traverse même pas, du plaisir, ce n'est pas seulement l'accident mais l'issue qui impose à l'auteur son virage, en son redoublement d'impasse, dans un sadisme, qui n'a plus d'autre échappatoire que masochiste.
Maurice Merleau-Ponty, pour en inverser le mouvement, semble en éviter la déviation fatale, en y décrivant le procès d'une révélation directe du corps au corps. Elle ne tient à vrai dire que de l'évocation d'une situation pensée ailleurs comme humiliante, laquelle comme pensée de la situation supplée au tiers, que l'analyse a montré être inhérent dans l'inconscient à la situation amoureuse.
Disons que ce n'est pas pour rendre plus valable pour un freudien la reconstruction de Sartre. Sa critique nécessiterait une précision, même pas encore bien reconnue dans la psychanalyse, de la fonction du fantasme. Nulle restitution imaginaire des effets de la cruauté ne peut y suppléer, et il n'est pas vrai que la voie vers la satisfaction normale du désir se retrouve de l'échec inhérent à la préparation du supplice <a href="#6">6</a>. Sa description inadéquate du sadisme comme structure inconsciente, ne l'est pas moins du mythe sadianiste. Car son passage par la réduction du corps de l'autre à l'obscène se heurte au paradoxe, bien autrement énigmatique à le voir rayonner dans Sade, et combien plus suggestif dans le registre existentiel, de la beauté comme insensible à l'outrage <a href="#7">7</a>. L'accès <a name="érotologie"></a>érotologique pourrait donc être ici meilleur, même hors de toute expérience de l'inconscient.
Mais il est clair que rien dans la phénoménologie de l'extrapolation perceptive, si loin qu'on l'articule dans la poussée obscure ou lucide du corps, ne peut rendre compte ni du privilège du fétiche dans une expérience séculaire, ni du complexe de castration dans la découverte freudienne. Les deux se conjurent pourtant pour nous sommer de faire face à la fonction de signifiant de l'organe toujours signalé comme tel par s<a></a><a></a>on occultation dans le simulacre humain, - et l'incidence qui résulte du phallus en cette fonction dans l'accès au désir tant de la femme que de l'homme, pour être maintenant vulgarisée, ne peut pas être négligée comme déviant ce qu'on peut bien appeler en effet l'être sexué du corps.
9. Si le signifiant de l'être sexué peut être ainsi méconnu dans le phénomène, c'est pour sa position doublement celée dans le fantasme, soit de ne s'indiquer que là où il n'agit pas et de n'agir que de son manque. C'est en quoi la psychanalyse doit faire sa preuve d'un avancement dans l'accès au signifiant, et tel qu'il puisse revenir sur sa phénoménologie même. On excusera mon audace du mode dont j'appellerai ici à en témoigner le second article mentionné de Maurice Merleau-Ponty sur le corps comme expression dans la parole.
Car ceux qui me suivent reconnaîtront, combien mieux filée, la même thématique dont je les entretiens sur la primauté du signifiant dans l'effetde signifier. Et je me remémore l'appui que j'ai pu y trouver aux primesvacances d'après la guerre, quand mûrissait mon embarras d'avoir à ranimer dans un groupe épars encore une communication jusque-là réduite au point d'Âtre a peu près analphabète, freudiennement parlant cela s'entend, de ce que le pli s'y conservât des alibis à l'usage d'habiller une praxis sans certitude de soi.
Mais ceux-là qui retrouveront leurs aises en ce discours sur la parole (et fût-ce à y réserver ce qui y rapproche un peu trop discours nouveau et
parole pleine), n'en sauront pas moins que je dis autre chose, et nommément :
- - que ce n'est pas la pensée, mais le sujet,
que je subordonne au signifiant,
- et que c'est l'inconscient dont je démontre le statut quand je m'emploie à y faire concevoir le sujet comme rejet de la chaîne signifiante, qui du même coup se constitue comme refoulé primordial.
Dès lors ils ne pourront consentir à la double
référence à des idéalités, aussi
bien incompatibles entre elles, par quoi ici la fonction du signifiantconverge
vers la nomination, et son matériel vers un geste où sespécifierait
une signification essentielle.
Geste introuvable, et dont celui qui porte ici sa parole
à a dignité de paradigme de son discours,
eût su avouer qu'il n'offrait rien de tel à percevoir à
son audience. Ne savait-il pas au reste qu'il n'est qu'un geste, connu
depuis saint Augustin, qui réponde à la nomination : celui
de l'index qui montre, mais qu'à lui seul ce
geste ne suffit pas même à désigner ce qu'on
nomme dans l'objet indiqué.
Et si c'était la geste que je voudrais
mimer, du rejet par exemple, pour y inaugurer le signifiant
du signifiant dans la syntaxe instaurant en série
les objets à soumettre au jeu du jet.Car au-delà
de ce jeu, ce qu'articule, oui, seulement là mon geste,
c'est le je évanouissant du sujet de la
véritable énonciation. Il suffit en effet que le jeu se réitère
pour constituer ce je qui, de le répéter, dit ce je
qui
s'y fait. Mais ce je ne sait pas qu'il le dit, rejeté qu'il est
comme en arrière, par le geste, dans l'être que le jet substitue
à l'objet qu'il rejette. Ainsi je qui dis ne peut être qu'inconscient
de ce que je fais, quand je ne sais pas ce que faisant je dis.
Mais si le signifiant est exigé comme syntaxe
d'avant le sujet pour l'avènement de ce sujet non pas seulement
en tant qu'il parle mais en ce qu'il dit, des effets sont possibles de
métaphore et de métonymie non seulement sans ce sujet, mais
sa présence même s'y constituant du signifiant plus que du
corps, comme après tout l'on pourrait dire qu'elle fait dans le
discours de Maurice Merleau-Ponty lui-même, et littéralement.
De tels effets sont, je l'enseigne, les effets de l'inconscient,
y trouvant après coup, de la rigueur qui en revient sur la structure
du langage, confirmation du bien-fondé de les en avoir extraits.
10. Ici mon hommage retrouve l'article sur l'Oeil
et l'esprit, qui, d'interroger la peinture, ramène la vraie
question de la phénoménologie, tacite au-delà des
éléments que son expérience articule.
Car l'usage d'irréel de ces éléments
dans un tel art (dont notons au passage que pour la vision il les a manifestement
discernés plutôt que la science) n'exclut pas du tout leur
fonction de vérité, dès lors que la réalité,
celle des tables de la science, n'a plus besoin de s'assurer des météores.
C'est en quoi la fin d'illusion que se propose le plus
artificieux des arts, n'a pas à être répudiée,
même dans ses œuvres dites abstraites, au nom du malentendu que l'éthique
de l'antiquité a nourri sous cette imputation, de l'idéalité
d'où elle partait dans le problème de la science.
L'illusion ici prend sa valeur de se conjuguer à
la fonction de signifiant qu'on découvre à l'envers de son
opération.
Toutes les difficultés que démontre la
critique sur le point non seulement du comment fait, mais du ce que fait
la peinture, laissent entrevoir que l'inconscience où semble subsister
le peintre dans sa relation au ce que de son art, serait utile à
rapporter comme forme professionnelle à la structure radicale de
l'inconscient que nous avons déduite de sa commune individuation.
Ici le philosophe qu'est Maurice Merleau-Ponty fait honte
aux psychanalystes d'avoir délaissé ce qui peut ici apparaître
d'essentiel à portée de se mieux résoudre.
Et là encore de la nature du signifiant, - puisque
aussi bien il faut prendre acte de ce que, s'il y a progrès dans
la recherche de Maurice Merleau-Ponty, la peinture intervient déjà
dans la phénoménologie de la perception, entendons dans l'ouvrage,
et justement en ce chapitre où nous avons repris la problématique
de la fonction de la présence dans le langage.
11. Ainsi sommes-nous invités à nous interroger
sur ce qui relève du signifiant à s'articuler dans la tache,
dans ces "petits bleus" et "petits marrons" dont Maurice Merleau-Ponty
s'enchante sous la plume de Cézanne pour y trouver ce dont le peintre
entendait faire sa peinture parlante.
Disons, sans pouvoir faire plus que de nous promettre
id de le commenter, que la vacillation marquée dans tout ce texte
de l'objet à l'etre, le pas donné à la visée
de l'invisible, montrent assez que c'est ailleurs qu'au champ de la perception
qu'ici Maurice Merleau-Ponty s'avance.
12. On ne peut méconnaître que ce soit à
intéresser le champ du désir que le terrain de l'art prenne
ici cet effet. Sauf à ne pas entendre, comme c'est le cas le plus
ordinairement des psychanalystes eux-mêmes, ce que Freud articule
de la présence maintenue du désir dans la sublimation.
Comment s'égaler à la pesée subtile
qui se poursuit ici d'un éros de l'oeil, d'une corporalité
de la lumière où ne s'évoquent plus que nostalgiquement
leur théologique primauté ?
Pour l'organe, de son glissement presque imperceptible
du sujet vers l'objet, faut-il pour rendre compte s'armer de l'insolence
d'une bonne nouvelle qui, de ses paraboles déclarant les forger
expressément pour qu'elles ne soient point entendues, nous traverse
de cette vérité pourtant à prendre au pied de la lettre
que l'oeil est fait pour ne point voir ?
Avons-nous besoin du robot achevé de l'Eve future,
pour voir le désir pâlir à son aspect non de ce qu'elle
soit aveugle, comme on le croit, mais de ce qu'elle ne puisse pas ne pas
tout voir ?
Inversement ce dont l'artiste nous livre l'accès,
c'est la place de ce qui ne saurait se voir : encore faudrait-il le nommer.
Quant à la lumière, nous souvenant du trait
délicat dont Maurice Merleau-Ponty en modèle le phénomène
en nous disant qu'elle nous conduit vers l'objet éclairé
<a href="#8">8</a>,
nous y reconnaîtrons la matière éponyme à y
tailler de sa création le monument.
Si je m'arrête à l'éthique implicite
en cette création, négligeant donc ce qui l'achève
en une oeuvre engagée, ce sera pour donner un sens terminal à
cette phrase, la dernière à nous en rester publiée,
où elle paraît se désigner elle-même, à
savoir que "si les créations ne sont pas un acquis, ce n'est pas
seulement que, comme toutes choses elles passent, c'est aussi qu'elles
ont presque toutes leur vie devant elles."
Qu'ici mon deuil, du voile pris à la Pietà
intolérable
à qui le sort me force à rendre la cariatide d'un mortel,
barre mon propos, fût brisé.
(numéro spécial sur Maurice Merleau-Ponty)
<a name="1"></a>1. Phénoménologie
de la perception, in-8, 531 pages. Gaillard, 1945.
<a name="2"></a>2. In La Psychanalyse. vol. 4,
pp.1-5 et la suite. P.U.F.
<a name="3"></a>3. PhénoménologIe de
la perception, Gallimard, 1945, pp.180-202.
<a name="4"></a>4 . pp. 202.232.
<a name="5"></a>5. In J.-P. Sartre. L'être
et le néant, pp. 451-477.
<a name="6"></a>6. Cf. livre cité, p. 475.
<a name="7"></a>7. Lieu analysé dans mon séminaire
sur l'Ethique de la Psychanalyse, 1959-1960.
<a name="8"></a>8. Cf. Phénoménologie
de ia perception. p.357.<a></a><a></a>